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MessagePosté: Lun 25 Déc, 2006 17:52
de jakes
Voici comment Geodffroy interprète ces évènements et occulte la mort violente de Cadvallo à Deniseburne en 634 :

§ 197….. Edwin fit alliance avec tous les roitelets saxons et vint à la rencontre de Cadvallo dans un endroit nommé Hedfeld, où il engagea le combat contre les Bretons. La lutte fut courte ; Edwin fut tué et avec lui presque tous les hommes qu’il commandait…..

§ 198 : Victorieux, Cadvallo envahit toute les provinces des Angles et exerça sa fureur contre les Saxons au point de n’épargner ni les femmes ni les enfants en bas age.
Puis il engagea le combat contre Offric, successeur d’Edwin ; il le tua ainsi que ses deux neveux…….

§199 : Ces hommes disparus, Oswald assura la succession du royaume de Northumbrie. Cadvallo l’attaqua à son tour et le mis en fuite
Ensuite, il envoya sur les lieux le roi de Mercie, Peanda, avec la plus grande partie e son armé pour livrer bataille à Oswald. Ce dernier fut assiégé une nuit par Peanda dans un endroit appelé Hevenfeld, c'est-à-dire « le champ céleste » où il dressa la croix du Christ
Les Saxons chrétiens d’Oswald obtiennent la victoire contre Peanda) (remarque: Penda de Mercie était paîen et très hostile à l'eglise)
A cette nouvelle, Cadvallo entra dans une colère noire. Il rassembla son armé, Poursuivit le roi Oswald qui fut attaqué et tué par Peanda lors d’un combat livré à Burne.

§200 : ….son frère Oswi lui succéda sur le trône de Northumbrie. Oswi concéda de nombreux dons en or et en argent à Cadwallo qui commandait désormais à toute la Bretagne »

Selon Geoffroy, pendant 48 ans, Cadvallo règne et laisse se déchirer les royaumes saxons de Peanda, Oswi etc, « que les querelles internes les divisent, qu’ils s’entretuent et disparaissent de notre île » déclare l’un de ses conseillers.

Il me semble qu’Oswald ne fut pas tué par Penda à Burne mais à la bataille de Maes Cogwy (642 ?), huit ans après qu'il eu éliminé Cadvallo à Heavenfield.
Est'il possible d'en savoir plus, en français pour plus de lisibilté, Agraes?

MessagePosté: Lun 25 Déc, 2006 18:37
de Agraes
Oswald est tué en 642 lors de la bataille de Maserfield, que les Gallois nomment Maes Cogwy. Bède fait son éloge comme un roi très chrétien mais aussi très puissant, "il s'établit comme seigneur de toutes les nations et provinces de Bretagne, qui est divisée entre des peuples de 4 langues, qui sont les Bretons, les Pictes, les Scots et les Angles."

Les circonstances qui menèrent à la bataille de Maserfield ne nous sont pas connus. Penda s'était probablement soulevé contre l'autorité d'Oswald, et les rois bretons l'avaient probablement suivi : Cynddylan de Pengwern, dont la tradition poétique dit qu'il avait 700 guerriers sous ses ordres, et probablement Eluan de Powys et Cadfael l'usurpateur du trône de Gwynedd. La bataille eut lieu près d'Oswestry, dont le nom dériverait "d'Oswald's tree". Oswald fut tué, son corps décapité et démembré. La Northumbrie se sépara à nouveau entre la Bernicie d'Oswiu et la Deira d'Oswine.

Remarque : Bède ne mentionne pas la présence de Penda et des Merciens à Heavenfield/Denisesburna. Il s'agit d'une bataille entre la puissante armée de Cadwallon - qui avait peut-être le soutien des Bretons assujetis aux Angles de Northumbrie - et la suite guerrière, les Gesiðas d'Oswald.

MessagePosté: Mar 26 Déc, 2006 14:29
de jakes
Tu nous a fait connaître le 13 décembre une bonne traduction de Bède en ligne de l'histoire ecclesiastique d'Angleterre.
La lecture en anglais est assez fatiguante (mais pas ininteressante, je t'assure) pour moi et certainement pour d'autre lecteurs:
Pourait tu préciser à quels chapîtres et quel livre ( livre III?) il relate ses évènements?

MessagePosté: Mar 26 Déc, 2006 17:14
de Agraes
Victoire de Cadwallon et de Penda à Hatfield, en 633, mort d'Edwin :
Livre II, XX
http://www.ccel.org/ccel/bede/history.v.ii.xx.html

Les ravages de Cadwallon, le retour d'Oswald, et la victoire de Deniseburna :
Livre III, I et II
http://www.ccel.org/ccel/bede/history.v.iii.i.html
http://www.ccel.org/ccel/bede/history.v.iii.ii.html

Vie et mort d'Oswald à Maserfield, les miracles qu'on lui attribue :
Livre III, VI et IX
http://www.ccel.org/ccel/bede/history.v.iii.vi.html
http://www.ccel.org/ccel/bede/history.v.iii.ix.html

MessagePosté: Mar 26 Déc, 2006 23:08
de jakes
super efficace, merci!

Castel an Trebez et autres

MessagePosté: Jeu 28 Déc, 2006 12:08
de André-Yves Bourgès
Bonjour,

Dans le cadre de leurs très intéressants échanges, deux des principaux acteurs de ce fil de discussion m'ont fait l'honneur de mentionner et de commenter mon article sur "L'expansion territoriale des vicomtes de Léon à l'époque féodale" ; ont également été évoqués le lai de Guigemar et le Livre des Faits d'Arthur (LFA), avec la figure de Conan Mériadec, autres sujets pour lesquels j'ai de l'inclination comme il se verra dans mon travail sur "Le contexte idéologique du développement du culte de saint Meriadec en Bretagne au Bas Moyen Âge" (Actes du colloque de Saint-Jean-du-Doigt 23-25 septembre 1999, publiés par le CRBC, Brest, 2001, p. 125-136).

Juste donc pour signaler que le LFA, dans la forme actuellement connue de ses maigres vestiges, est datable avec assez de précision des années 1305-1312 ; qu'il démarque largement des sources antérieures, dont la fameuse vita de saint Goëznou qui, là encore, dans la forme actuellement connue de ses vestiges, est datable de la fin du XIIe siècle et sans doute précisément de l'année 1199 [voir dernier état de la question dans l'article du regretté H. Guillotel sur "Le poids historiographique de La Borderie", MSHAB, t. 80 (2002), p. 356-359.] Permettez moi à cette occasion d'indiquer que mon grand ami et principal contradicteur sur ces questions, Gwenael Le Duc, vient de s'éteindre prématurément, âgé de 55 ans seulement, au terme d'une longue maladie ; et qu'après le décès récent de Guillotel, les études bretonnes, en particulier dans leur dimension hagio-historiographique, viennent de perdre une autre figure majeure.

J'en reviens à Castel an Trebez, dont la dénomination est incontestablement descriptive : je ne suis pas sûr d'avoir lu dans le fil de la discussion une référence à la note donnée par Y.-P. Castel, dans le BSAF, t. 116 (1987), p. 69-72, qui donne un plan assez détaillé du site. Pour le reste Y;-P. Castel, tout comme P. Kernévez, en est réduit à commenter les indications données par Albert Le Grand, dont le témoignage ne doit pas être réfuté a priori ; mais dans tous les cas de figure, l'ampleur de ce système défensif antique a pu frapper les auteurs des XIIe-XIIIe siècles (poètes, hagiographes, chroniqueurs,...), chez qui il est souvent possible de constater une certaine forme de curiosité "archéologique" dont témoignent par exemple la vita de saint Efflam et la version longue de la vita de saint Tugdual.

Bien cordialement

André-Yves Bourgès
www.hagio-historiographie-medievale.fr

MessagePosté: Jeu 28 Déc, 2006 15:48
de jakes
Je ne pense pas prendre trop de liberté en présentant tout d’abord mes sincères condoléances et celles de l’équipe de l’Arbre celtique à la famille et aux amis de Gwenael Le Duc qui nous quitte si prématurément.

La mort d’un chercheur a cela de terrible qu’elle vient le prendre alors que les champs d’investigations sont encore largement ouverts et qu’il lui faut les quitter désormais, sans réponses.

La démarche et l’éthique de l’Arbre celtique s’inscrit dans le droit fil de cette recherche positiviste et rationaliste qu’incarne votre génération de chercheur, Gwenael, et vos prédécesseurs.

Cher A Y Bourgès,
Vous montrez en tout cas que le débat et la contradiction n’exclus pas l’amitié et le respect réciproque.
Effectivement, au sujet de Castel an Trebez, il est impardonnable de ne pas avoir fait état du travail de P Y Castel.
Je regrette de ne pouvoir le faire moi-même (bien qu’une forte minorité bretonne compose sa population, les bibliothèques du Havre ignorent superbement la collection des BSAF.).
Je pense qu’un lecteur du forum saura combler cette lacune.

MessagePosté: Lun 01 Jan, 2007 23:44
de jakes
André Yves Bourges le 28 décembre 2006 :

« J'en reviens à Castel an Trebez, dont la dénomination est incontestablement descriptive : je ne suis pas sûr d'avoir lu dans le fil de la discussion une référence à la note donnée par Y.-P. Castel, dans le BSAF, t. 116 (1987), p. 69-72, qui donne un plan assez détaillé du site. Pour le reste Y;-P. Castel, tout comme P. Kernévez, en est réduit à commenter les indications données par Albert Le Grand, dont le témoignage ne doit pas être réfuté a priori ; mais dans tous les cas de figure, l'ampleur de ce système défensif antique a pu frapper les auteurs des XIIe-XIIIe siècles (poètes, hagiographes, chroniqueurs,...), chez qui il est souvent possible de constater une certaine forme de curiosité "archéologique" dont témoignent par exemple la vita de saint Efflam et la version longue de la vita de saint Tugdual. »

Taliesien, le 3 juin 2006 :

« voici ce que dit Patrick Kernevez à propos du Castel-an-Trebez :
la date d'édification de cette enceinte n'est pas connue. Selon Albert le Grand, elle était l'une des places de Guyomarc'h IV. Henri II l'aurait prise en 1170, et le duc de Bretagne Jean IV l'aurait définitivement incendiée en 1374 (cf. tome 1, p. 40 ; tome 2, p. 207-208)
donc, ce n'est pas le Castel-an-Trebez qui fut incendié par Henri II en 1167. »

J’ai déjà expliqué pourquoi je doutais fort que Castel an Trebez fut une place militaire encore importante au milieu de la guerre de cent ans, n’ayant plus aucun intérêt stratégique qui justifie un nouvel incendie en 1374.

Pourtant, Albert le Grand parle encore de cette place forte en 1636 :
L'associe t'il à un haut et antique personnage qui eut été à la mesure du lieu : Conan Mériadec, Pol Aurélien , le comte Even? Nenni.
Fait t’il même le rapprochement étymologique ( c'était déjà de mode!)avec le prestigieux château de Trèbes du roi ban de Benoic, père de lancelot ? Rien.
Témoignage modeste et bien isolé, il en fait l’une des trois principales places fortes du Léon détruite en 1167 par Henry Plantagenêt et l’associe aux vicomte du Léon Guyomarc’h (co-régnant à cette date avec son père Hervé qui décède un an plus tard.)
Assez modeste pour être crédible.
Une tradition locale, qui ne colle pas avec l’orgueil qu’on prête au Léonards. Taulé c’est déjà presque le Tregor ?

MessagePosté: Mar 02 Jan, 2007 12:53
de André-Yves Bourgès
Bonjour,

Le témoignage d'Albert Le Grand est intéressant en ce qu'il nous a transmis le souvenir de traditions encore attachées à Castel an Trebez à son époque : effectivement, il n'a pas eu recours à une explication qui mette en oeuvre son habituel "système" historique relatif aux origines de la Bretagne armorique, système qui emprunte l'essentiel de sa matière à l'HRB. En revanche, l'absence de rapprochement avec les personnages de la geste arthurienne ne signifie pas grand'chose, à mon avis, car Albert Le Grand ignore manifestement (volontairement ou involontairement ?) ce qui de près ou de loin intéresse cette geste : ainsi, dans sa biographie de saint Riok, alors qu'il fait du manoir de Goelet-Forest le propre manoir familial du saint, il ne souffle mot de la tradition déjà rapportée en 1479 dans le mémoire produit par le vicomte de Rohan, de la résidence en ce lieu même du roi Arthur et de ses chevaliers.

J'ai parlé d'un incontestable intérêt "archéologique" des auteurs des XIIe-XIIIe siècles : cet intérêt est manifeste chez de nombreux hagiographes ; on le retrouve également chez Geoffroy de Monmouth, combiné comme c'est souvent le cas à un recours systématique à l'étymologie, mais aussi chez Marie de France à propos du château de Mériadec ou encore, plus tardivement chez celui qui a procédé à la réfection de la "Chanson d'Aiquin". De nombreux chercheurs ont fait justice d'identifications hasardeuses ou d'approches qui méconnaissaient la fantaisie "toponymique" des auteurs de "romans" ; mais je crois qu'ils ont été parfois emporté par un élan excessif et je pense qu'il serait intéressant de reprendre leurs conclusions : c'est pourquoi l'hypothèse de castel an trebez comme "modèle" du château de Trèbes me semble très intéressante et mérite d'être creusée.

Enfin (clin d'oeil à Taulé en Trégor), je pense que le pagus (major) Leonensis de l'époque carolingienne incluait en fait les pagi (minores) castelli et trecorensis (sans parler du pagus civitatis, qui ne se retrouve que dans le seul dossier hagiographique tugdualien) ; mais c'est une autre histoire.

Bien cordialement

André-Yves Bourgès

MessagePosté: Mar 02 Jan, 2007 13:02
de jakes
Pour les évènements de 1374, je n’ai que ceci sur le net :

Démêlés de Jean IV, duc de Bretagne, avec les Morlaisiens selon Hervé Laizet : Morlaix, image d’hier et d’aujourd’hui.

« En 1374,( Jean IV, duc de Bretagne) ayant rassemblé une armée de 3 000 hommes d'armes et de 2 000 archers (anglais), débarque au Conquet, marche sur Saint-Pol et s'apprête à descendre sur Morlaix promise au pillage de ses troupes. Conscients du déséquilibre des forces, nos Morlaisiens jugent plus prudent de négocier. Ils congédient les quelques soldats français qui gardaient la ville, démontent les portes et envoient une délégation à Saint-Pol. Inflexible, Jean IV emprisonne les parlementaires. L’armée s'ébranle en direction de Morlaix. Terrorisés, les habitants se portent au devant du duc pour implorer sa grâce. La rencontre a lieu dans la vallée du Donant - aujourd'hui Pennélée - La vue de cette population désarmée, à genoux, clamant: «Miséricorde, vive Bretaigne », émeut enfin le duc. Cependant son pardon avait pour condition la désignation, par les Morlaisiens eux- mêmes, de cinquante des plus coupables d'entre eux.
Coroller, bourgeois de Morlaix, se présenta au duc, pieds nus, la corde au cou, offrant sa vie pour sauver tous les autres. Hélas!, il fut aussitôt pendu au lieu dit, encore aujourd’hui, la Roche Coroller. Cinquante otages furent conduits au château de Cuburien où le duc passa la nuit.
Le lendemain, quittant le château, propriété du vicomte de Rohan, parent de Charles de Blois, Jean IV y mit le feu. Les cinquante malheureux otages furent traînés, corde au cou de Cuburien à Morlaix. Cinquante gibets furent dressés dans l'après-midi sur les murs du château. Toute la population horrifiée fut contrainte d'assister au supplice. »

Je ne connais pas la roche Coroller, mais les fourches patibulaires de la haute justice du Daoudour- Penzé étaient situées près de la chapelle de la Magdeleine , à l’endroit ou la route de st Pol à Morlaix franchis la Pennélé, à 2,5 km en amont de Castel an Trebez. C’est le lieu logique d’un passage de troupe et de la rencontre avec le duc.

Il existait également un passage par le vieux chemin du Hinguer à Bigodou.
Ces deux chemins étaient des passages obligés du Tro Breiz de St Pol de Léon à Treguier.( je pourrait envoyer une carte, si quelqu'un se propose de la reproduire ?)

Cuburien se situe au nord est, le long de la rivière de Morlaix dans la commune de St martin des champs à 1 km à vol d’oiseau de Castel an Trebez. Il existait alors un gué, à l’endroit où la maré ne remonte plus le cour de la Pennelé. Ce gué est parfaitement contrôlable et visible à partir du Castel an Trébé.

Mais celui-ci devait être bien désert à cette époque.

MessagePosté: Mar 02 Jan, 2007 14:29
de André-Yves Bourgès
Bonjour,

Le récit, très vivant, de Hervé Laizet, fait la synthèse de diverses traditions tardives, (notamment familiales en ce qui concerne Eon Coroller), qui apparemment toutes découlent là encore de la même et unique source, à savoir Albert Le Grand. Les chroniqueurs contemporains (ex. : Guillaume de Saint-André) ou les premiers historiens (ex.: Pierre Le Baud) sont beaucoup moins diserts sur ces évènements ; le professeur M. Jones, le spécialiste bien connu de Jean IV, n'y fait même pas allusion.

D'un point de vue toponymique "La Roche-Coroller" pourrait plutôt marquer l'appropriation du lieu par un membre de cette famille, dont on n'a pas d'ailleurs de généalogie suivie avant la fin du XVe siècle :
Eon Coroller

Bien cordialement

André-Yves Bourgès
www.hagio-historiographie-medievale.fr

MessagePosté: Dim 07 Jan, 2007 2:53
de jakes
Bloavezh mat d’an holl.
Je reviens d’un rapide voyage à la Roche sur Yon, en Vendée. Je n’ai pas eu l’occasion malheureusement de passer par Nantes pour fouiller dans les BSAF de 1987.

En ce qui concerne les évènements de 1374, les traces d’un incendie du Trebes à cette époque seraient décidément introuvables, la reddition des bourgeois de Morlaix sur un lieu de passage de la Pennélé, l’incendie de Cuburien à un Kilomètre du Trébes serait même sujette à caution.

Je ne relate ces évènements que pour souligner que Castel an Trebez avait assez de prestige quelque temps (mais combien de temps ?) après la guerre de cent ans dans la région pour être mêlé aussi à ces évènements. Mais par quel historien et à quel moment ?
Peut être même après Albert Le Grand ?
Il me semble que c’est à ceux qui soutiennent la réalité de cet incendie de 1374 de faire cette recherche.

Pour ma part, je maintiens que Castel an Trebes ne montre aucune des caractéristiques d’une forteresse du XIVième siècle.

MessagePosté: Dim 07 Jan, 2007 16:19
de jakes
Albert le Grand en 1667 n’hésite pas à mettre sur le même pied d’égalité la forteresse du Trebez avec Lesneven et St Pol de Léon, comparaison incroyable en son temps s’il ne s’appuyait sur une solide tradition locale.

Quelques mots sur la situation féodale dans la partie Est du Léon , l'ancien Pagus Daoudour, quelques temps après les évènements de 1374 et deux siècles après le démembrement du comté du Léon :

A l’issue de la guerre de cent ans, la paroisse de Taulé où se situent les ruines de Castel an Trebez relève principalement de la juridiction et du fief de Daoudour-Penzé qui s’exerce également sur une partie de st Martin des champs et au faubourg de la Ville neuve de Morlaix.
La justice s’exerce au chef lieu de la juridiction à Penzé, à l’autre extrémité de la paroisse de Taulé et ses trèves : Locquenolé, Henvic, Carantec.

Hervé de Kerret sr du Val (à st Martin des champs) est le petit fis de Maurice de Kerret , comte de Penzé par son mariage vers 1300 avec Marguerite I de Guernisac (en Taulé) dernière héritiere de cette branche cadette des anciens comtes du Léon.
mais il ne porte pas le titre de comte de Penzé.
(Alain de Rohan 1382-1462 comte de Léon en aurai desaisi son père Henri de Kerret, capitaine de Morlaix à cause sa collaboration avec les Monfort au profit d’une branche cadette des Kerret, tenante du fief de Guernissac (en Taulé)? :’on retrouve Olivier de Quelen époux vers 1450 de Marguerite II de Guernisac comme comte de Penzé.)

Les fourches patibulaires de Penzé, qui exerce la haute et basse justice sont situées à la Madeleine, sur la route de Penzé à Morlaix, à la limite des paroisses de Taulé et de Saint Martin des champs et à l’embranchement de la route vers Plouvorn. Elles restent actives jusqu’aux années 1630.

Le comte de Penzé possède le droit d’appel , souvent bafoué, de la juridiction vassale de Penhoat sur une partie de Guiclan et St Thegonnec (Kermellec- Locmeven), et quelques villages au sud de Taulé.
Le fief de Penhoat est beaucoup plus puissant de fait: Car les comtes de Penhoat (Jean , amiral de Bretagne comte de Penhoat 1403-1448) possèdent également des droits juridictionnels à Plouvorn, Plouneour menez, commana, concurremment ou inféodés à d’autres juridictions : Kersauson (à Guiclan), Lesquifou (à Pleyber Christ) et Bois de la Roche (à Commana), également dans le Tregor (Guerlesquin, etc). Depuis 1425 le duc a détaché ces 25 paroisses trégoroises de la chatellenie de Guingamp pour les rattacher à celle de Morlaix en appel.
En 1434, jean de Penhoat, fidèle du Duc, Amiral de Bretagne en retraite sur ses terres, fait édifier les tours du château de Penhoat et obtient un quatrième pot de justice: Ses fourches patibulaires sont situées à un tiers de lieu à l’est de son château, à Taulé, sur l’éminence proche du croisement de la route de Morlaix à Lesneven et du Hent Castel, route de pèlerinage du tro Breiz qui arrive de Quimper vers St Pol.

L’ Est Léonnard est également partagé avec les juridictions du Daoudour-Landiviziau et le Régaire de l’évêque du Léon (St Pol, dont relève la trève de Carantec).
La trève de Locquenolé relève du régaire de Dol.

(il subsistait encore quelques « mottes serviles » autour de Lesneven-Kerlouan à l’isue de la guerre de cent ans et la « Quevaize » pratiquée au Releq fut abolie définitivement au début du règne de Louis XIV.)

A Taulé (et quelques paroisses à l’est du Léon), seule une quarantaine de « convenants ou domaines congéables » (encore à la veille de la Révolution,) sont réglés selon l’usement du Tregor. Mais comme ailleur dans les paroisses du Léon, le fermage est dominant.

MessagePosté: Dim 07 Jan, 2007 23:45
de jakes
Rectificatif: Albert le Grand écrit en 1636, à la période où la haute justice du Daoudour Penzé cesse de s'exercer.

François II de Kerangroagez, fidèle de la première heure à Henri IV est le dernier comte de Penzé ayant exercé la haute justice.
Il décède en 1617 dans son manoir de Kerangomarc’h à Taulé .
(Kerangomarc'h est l'une des pronostés du Daoudour Penzé avec Castelmen et Kerlosquet (trève de Carantec) dans la grande paroisse de Taulé et la motte de Ty Coz Kerangomarch, dit "la motte au singe" est probablement à l'origine de ce fief).

Sa veuve Gilette de Quelen décédée en1641 est dame de Kerohant (Garlan), Kerver (Plouenan), Kergadiou (Plourin) Kerosal (Plouguin) etc... ,Guernissac, Kerangomarc’h, Keromnes, Chateaumen, Kerosarch, coatiliez à Taulé, Villeneuve à Saint Martin, se distingue par des oeuvres de charité:
La donation d'une terre pour les pestiférés de 1631 par exemple où fut construite la chapelle de st Herbot ( à 1Km à l'est de l'église paroissiale de Taulé), avec la bénédiction du recteur Rolland de Poulpiquet, sieur de Feunteunspeur et de Kermen (Carantec), auteur en 1636 d'une vie de St Tenenan, le patron de st Carantec puis vicaire du Léon en 1649.

Le contexte est celui de la réforme catholique et des missions.

Albert Le grand participe et prend ses informations dans cette solide tradition locale, nobiliaire et éclésiastique.

Comtes de Léon et comtes de Penzé

MessagePosté: Sam 13 Jan, 2007 16:21
de André-Yves Bourgès
Bonjour Jakes,

Je partage votre analyse : je ne crois pas que nous ayons affaire en ce qui concerne Castel an Trebez à une forteresse utilisée (et donc incendiée) au bas Moyen Âge. En revanche, je crois que le site pouvait exercer une fascination "archéologique" sur les auteurs des XIIe-XIIIe siècles, à l'instar (par exemple) de la fascination exercée par l'éperon barré et de la forteresse gallo-romaine du Yaudet (en Ploulec'h).

En ce qui concerne Penzé, je serais heureux de voir les actes de la pratique où cette seigneurie était décorée du titre de comté au Moyen Âge. De même, il n'a jamais véritablement existé de "comtes de Léon", le seul porteur de ce titre, le comte Hervé l'ayant reçu du roi d'Angleterre Etienne de Blois, son beau-père, à cause du comté de Devizes dont Hervé s'était vu confier la garde en 1140 ; mais aussi bien le père de ce "comte Hervé" que son fils ont porté le seul titre de vicomte. Il y a bien des discussions sur l'origine de la dynastie vicomtale de Léon et sur le "comte" dont ces vicomtes étaient les officiers ; je renvoie, faute de pouvoir développer ici, à deux études entre plusieurs :
- Hubert GUILLOTEL, "Les vicomtes de Léon au XIe et XIIe siècle", dans MSHAB, t. 51 (1971), p. 29-52
- André-Yves BOURGES, "L'expansion territoriale des vicomtes de Léon à l'époque féodale", BSAF, t. 126 (1997), p. 355-374.

Cordialement

André-Yves Bourgès
www.hagio-historiographie-medievale.fr