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Voulez vous danser avec moi ce soir?

MessagePosté: Mar 26 Sep, 2006 17:43
de lopi
Les danses pyrrhiques étaient des danses simulant des combats.
Les Grecs les pratiquaient.
quel(s) dieu(x) les chapotait, s'il en existait?
Avaient-elles leurs équivalents chez les Romains, chez les Gaulois?
Et toutes les questions auxquelles je n'ai même pas pensé...

A+
Lopi rat de la bastille

MessagePosté: Mar 26 Sep, 2006 19:30
de Agraes
J'ai entendu parler d'une danse de l'épée, dont on trouverai un écho lointain dans le chant traditionnel Gwin ar C'halloued.

MessagePosté: Mer 27 Sep, 2006 8:57
de DT
Ave,
Les danses pyrrhiques pourraient avoir eu un rapport avec l'initiation guerrière et les Männerbünde
Voici une information assez ancienne:
Jeammaire H., Couroi et Courètes, Essai sur l'éducation spartiate et les rites d'adolescence, Paris, 1939
Il se pourrait même que la trace la plus ancienne qu'aient laissée des pratiques de lycanthropie rituelle, et qui nous reporterait effectivement à quatre ou cinq siècles avant la date des plus anciens témoignages précités, soit celle qui résulterait de l'interprétation d'un monument figuré, où se rencontre l'association du motif de l'homme déchiré par les loups et de scènes d'un caractère nettement agonique. Dans quelques pages insérées (en 1932) dans le deuxième volume des Mélanges Glotz (Un thème initiatique sur un vase du Dipylon, Mélanges Glotz, 1932, t. II, p. 483), nous avons indiqué un point de vue de ce genre comme susceptible de fournir une solution aux difficultés d'interprétation que pose le décor d'un vase fréquemment reproduit (en particulier Perrot-Chipiez, Histoire de l'Art, VII, p. 181, fig. 65-66) et qui appartient à la série du Dipylon. Comme dans les autres produits de la céramique athénienne de style géométrique, les scènes qui ornent les flancs, au-dessous d'une frise d'animaux, oiseaux et cervidés, au repos ou au pâturage, doivent être comprises comme des scènes empruntées à la vie réelle, du type de celles que nous fait connaître, par exemple, l'imagerie du Bouclier d'Achille. Le problème [p : 566] résulte de la présence, au milieu de six épisodes figurant des personnages, et notamment des danseurs et des gymnastes, ainsi que des porteurs et des porteuses de guirlandes, d'un septième épisode dans lequel deux fauves, affrontés, déchirent à large gueule un jeune guerrier, manifestement un frère de ceux dont la gesticulation anime les groupes qui sont représentés d'autre part. Ces petites scènes, enlevées avec une verve remarquable, et parmi lesquelles une est devenue particulièrement célèbre parce qu'on veut y reconnaître généralement la plus ancienne représentation d'une danse armée du type de la pyrrhique, se laissent aisément interpréter comme figuration de divers moments d'une cérémonie comportant des épreuves athlétiques (notamment la course et le saut), des danses et « pas d'armes », des portements processionnels de guirlandes (ou de rameaux) et de vases, le tout avec concours actif de citharèdes. La nudité des personnages, y compris les deux personnages féminins, qui n'est certainement pas conventionnelle, peut être entendue comme un cas de nudité rituelle et cadrerait bien avec cette interprétation.
En somme il ne faudrait qu'un peu appuyer sur ces observations pour concevoir que ce petit monument, où il est classique de chercher l'image la plus ancienne des Courètes, ou personnages similaires, dansant la pyrrhique hyporchématique (cf. Séchan, La danse grecque antique, p. 95), nous donne aussi la représentation, précieuse par son antiquité, des gymnopédies, voire des oschophories-staphylodromies (si l'on tient les guirlandes comme équivalents des sarments de vignes des fêtes plus récentes) et des deipnophories (si l’on considère comme deipnophores les deux femmes portant des vases sur la tête et placées à ce qui est vraisemblablement l'extrémité de la composition). La singularité, c'est la présence au milieu de ces différents épisodes et manifestement en évidence sur l'un des flancs de l'amphore, du motif du jeune guerrier happé par les mâchoires formidables de deux fauves. Du rapprochement avec un motif analogue, fréquent dans l'art oriental, et de l'énormité des griffes qui terminent les membres des deux animaux, le premier éditeur de ce monument, Fürtwaengler, suivi par Perrot, avait conclu à reconnaître en eux des lions, déformés par l'inexpérience de l'artiste. Mais l'allongement des mâchoires, la forme des oreilles, l'allure générale des deux [p : 567] animaux, inviteraient plutôt à y voir des loups. A moins de supposer un caprice, peu vraisemblable, de la part d'un artiste que les autres parties de son œuvre montrent doué d'un sens développé de la composition, il faut bien croire qu'il y avait quelque relation entre les scénarios agoniques qui se déroulent de part et d'autre et le sort du jeune garçon déchiré par les deux fauves (F. Poulsen, Die Dipylongräber u. die Dipylonvasen, 1905, p. 126, voit dans la décoration du canthare de Copenhague, des scènes sans lien, des jeux gymniques, mais aussi de véritables combats ; même opinion dans P. Ducati, Storia della Ceramica greca, 1922. Le motif qui a servi de modèle au groupe central dérive en effet d'un prototype oriental où figurent deux lions, mais il ne s'ensuit pas que l'artiste n'ait pas interprété son modèle). Il me paraît encore que l'explication la plus satisfaisante est celle qui résulte du point de vue où nous nous sommes placé en considérant les fêtes à programme à la fois orchestrique et gymnique comme se rattachant à la clôture normale de cycles d'initiation et en insistant sur le fait que ces cycles initiatiques comportent naturellement épreuves avec menace, pour les novices, d'être avalés ou déchirés par des monstres anthropophages appartenant à des congrégations à déguisements, — et donc à métamorphoses — en animaux. On ne s'arrêtera pas à examiner si l'énormité même des griffes pendant aux quatre membres des loups de l'amphore de Copenhague ne conviendrait pas spécialement à des figurants dissimulés sous une peau. Mais on retiendra que le vase du musée de Copenhague, que l'habileté de sa facture invite à considérer comme un produit récent du style géométrique, porte témoignage, à tout le moins, pour le VIIIe siècle. C'est l'époque, obscure entre toutes, où paraît s'être épanoui ce gouvernement « des guerriers », et d'abord même « des chevaliers », dont Aristote savait encore qu'il avait été une étape importante dans le devenir de la cité hellénique. Les débris de l'imagerie du Dipylon qui nous donnent au moins l'aspect extérieur de quelques-uns des moments importants de la vie sociale à cette époque, si incomplètement et si indirectement éclairée par les témoignages littéraires, nous auraient-ils, par un curieux hasard, conservé a la fois le souvenir, si l'on peut dire, de Théseia antérieures à Thésée, nous voulons dire à l'époque où Thésée fut admis comme le héros de ces fêtes athlétiques, et d'une version du « tribut » antérieure à l'époque où la fable du Minotaure jouit d'une sorte d'exclusivité ?
[p : 568] Des remarques précédentes, il convient de tirer la conclusion que la Grèce archaïque a certainement connu, entre autres corporations religieuses, des confréries d'hommes-loups, c'est-à-dire d'hommes voués après initiation et pour une période de plus ou moins longue durée, par intervalles sans doute, à mener le genre de vie solitaire et sanguinaire de l'animal dont ils imitaient les mœurs. Au moment où nous les atteignons, c'est-à-dire à travers des témoignages qui ne remontent qu'exceptionnellement au delà du IVe siècle, ces vieilles institutions, là où il en subsistait quelque chose, avaient profondément évolué. Dans la Grèce du Nord, il n'en survivait plus peut-être qu'un groupe de légendes dont quelques-unes fournissaient l'aition d'un interdit relié au souvenir d'une ancienne forme de sacrifice humain. Dans la Grèce centrale, à Delphes notamment, le jeu des loups comportait un masque qui éveillait le souvenir traditionnel du « loup » Dolon. Au mont Lycée, où se perpétuait un rite barbare, la lycanthropie était devenue le mode de recrutement d'un sacerdoce. Cette ambiance est propre à rendre vraisemblable l'hypothèse d'après laquelle le genre de vie imposé aux jeunes gens engagés dans les pratiques de la cryptie témoignerait, à Sparte aussi, de l'existence d'une confrérie de même caractère, à laquelle ces pratiques auraient servi d'initiation. Son aspect originel s'était également altéré, au cours des temps, mais dans des conditions différentes. L'altération tenait ici au fait surtout qu'elle était devenue organe quasi-officiel et que son activité avait été tournée de plus en plus vers des fins de police politique. L'élément religieux et l'orgiasme qu'elle avait eus apparemment en commun avec les sociétés analogues, avaient fait place à un élément administratif, assez apparent au moment où nous en recueillons les premiers témoignages et lorsque, sous le coup des grandes révoltes d'hilotes du Ve siècle, elle avait pris la forme d'une sorte de Ku-klux-clan, dans la main des autorités. Mais cette main-mise de l'Etat spartiate sur la société, s'explique au mieux si, comme nous en avons formé plus haut l'hypothèse, la société des hommes-loups, à Sparte, avait entretenu dès longtemps les rapports les plus étroits avec le corps des couroi, c'est-à-dire des chevaliers lacédémoniens, recrutés parmi les plus valeureux des irènes et où nous inclinons à [p : 569] voir une cellule, occulte peut-être, mais néanmoins essentielle, de l'organisation spartiate. La cryptie représenterait ainsi comme un deuxième degré des initiations dont le premier, de caractère moins spécial, mais où l'accent est mis également sur les épreuves d'endurance, correspondrait, cinq ou six ans plus tôt, à l'année de noviciat des mellirènes.
A+

MessagePosté: Mer 27 Sep, 2006 11:05
de lopi
Merci DT pour ce texte.
La relation des danses pyrrhiques à la lycanthropie rituelle et au culte Dionysiaque ne me surprend pas vraiment, mais il est vrai que cela ouvre des perspectives comparatistes. Cette initiation guerrière et 'viriliste" ne peut-elle pas s'apparenter alors au passage du Pseudo-Aristote sur les gaulois allant combattre les vagues?
A+
Lopi

MessagePosté: Mer 27 Sep, 2006 14:24
de lopi