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De la Matière de Bretagne…

MessagePosté: Mar 04 Jan, 2005 1:41
de Fergus
Je retransmets un article très clair sur la Matière de Bretagne, disponible à : http://www.ac-rennes.fr/pedagogie/lettr ... t/mat2.htm


De la Matière de Bretagne…

C'est un véritable écheveau que l'on s'apprête à saisir lorsque l'on aborde la Matière de Bretagne… Matière, en effet, puisque l'on dispose d'une masse de textes, complets ou non, de différentes époques, de différentes origines, en différentes langues, et d'inspiration, de contenus ou de propos différents.
Quel élément peut-on, par conséquent, mettre en avant pour fonder la cohérence d'un tel ensemble ?
Le personnage d'Arthur est central, il est vrai, et indispensable à cet univers : toute aventure, si elle ne commence pas à sa cour, y est rattachée d'une façon ou d'une autre ; de là, le fait que l'on peut légitimement parler de "légende arthurienne", de "mythe arthurien", voire de "roman arthurien". Mais il faut avouer que le personnage d'Arthur n'est lui-même directement et activement impliqué que dans un nombre limité d'aventures. Ainsi, il représente souvent davantage un garant (fiable ou fautif selon le cas) ou un témoin tutélaire de tout un univers qu'un véritable acteur. Si c'est sur les différentes prouesses engagées par chacun des héros que l'on veut insister, on parlera de "Cycle du Graal", ou de "Romans de la Table Ronde".
Mais on s'interdira alors malheureusement d'en voir la parenté avec les différentes versions de Tristan et Iseult ou les Lais de Marie de France, dont le Lai du Chèvrefeuille qui en constitue l'une des plus anciennes mentions. De plus, tant le Graal que la Table ronde sont absents en tant que tels des récits celtiques qui servirent d'archétypes.
Aussi convient-il de saisir cet héritage dans toute sa complexe unité, de lui donner un nom qui lui soit familier puisqu'avec Jean Bodel on peut donc considérer que "ne sont que trois matières à nul homme entendant/ de France, de Bretagne et de Rome la grand". C'est-à-dire que la Matière celtique se distingue de la Matière carolingienne (Chanson de Roland…) et de la Matière antique.
Chrétien de Troyes, dans son prologue de Lancelot, indique que son commanditaire, Marie de Champagne, lui a fourni à la fois "matière" - la trame de l'histoire - et signification - le sens qu'elle voulait donner à celle-ci - et que la tâche du poète consiste à élaborer une "molt belle conjointure"…
A défaut de l'éclaircir, ceci marque au moins le lien entre l'origine celtique attestée de ces récits et ce qui a pu être élaboré à partir de là par différents auteurs ou inspirateurs, sans passer sous silence la corrélation entre la forme et le fond de ces récits, les évolutions structurelles, le passage de la poésie à la prose ou l'origine même du terme "roman"…


A. D'une généalogie l'autre : une filiation sinueuse
La filiation celtique est en effet attestée par le témoignage même d'auteurs comme Marie de France qui ne manque jamais l'occasion de noter que, des récits qu'elle nous propose, "li Bretun firent un lai"… (voir Guigemar, Equitan, Lanval, Laüstic). Par ailleurs, les titres mêmes des récits nous parleront bientôt de Gallois, etc.
Pour autant, cette filiation se présente sous la forme d'une superposition de strates qui peuvent difficilement être abordées chronologiquement du fait que les récits ont été véhiculés par oral pendant plusieurs siècles et transcrits à des époques diverses et dans un ordre parfois aléatoire… C'est donc davantage sur les motifs ou schèmes que l'on s'appuiera pour distinguer les étapes marquantes successives.
Cette Matière celtique a été étudiée de façon assez systématique par Jean Marx et on se reportera toujours utilement à ses travaux. Mais, comme point de départ, on évoquera l'ensemble de représentations et de croyances que Georges Dumézil a si judicieusement défini comme constituant une 'idéologie'.
En effet, les peuples celtiques appartiennent à la "communauté indo-européenne". C'est dire que plus qu'à des éléments "raciaux" ou simplement politiques, ils ressortissent à un même système linguistique, religieux, artistique lequel a trouvé dans l'Irlande ancienne un véritable conservatoire, du fait de l'absence de romanisation et d'une christianisation tardive mais rapide qui a absorbé d'un seul coup un corpus païen très ancien.
Des chercheurs tels que F. Le Roux et Ch-J. Guyonvarc'h ont consacré l'essentiel de leurs recherches à l'étude, dans leurs langues originale, ces récits dont l'archaïsme permet de distinguer un état premier de ces croyances.
De l'Inde védique à l'Irlande, dans cette façon de penser le monde des dieux et celui des humains, les hommes "libres" se répartissent selon trois fonctions ou classes : la fonction sacerdotale (incluant non seulement les prêtres mais aussi les médecins, les poètes et musiciens, les juristes et généalogistes…), la fonction guerrière et la fonction productrice (artisanale et agricole).
Le roi, personnage clé de cette société, est issu de la deuxième fonction mais investi par l'autorité de la première : il se trouve donc, pour le meilleur ou pour le pire, représenter un point de conjonction entre le religieux, domaine dans lequel il n'exerce cependant aucune fonction, et l'historique ou le 'sociétal' comme on le dirait aujourd'hui…
Première étape importante, donc les récits mythologiques ou héroïques qui nous décrivent assez fidèlement cette conception du monde. Ils n'ont pu être transcrits que suite à l'introduction de l'écriture, c'est-à-dire aussi du Christianisme, par des moines irlandais qui, à plusieurs siècles d'écart, se sont efforcés de compiler et de consigner le plus fidèlement possible des récits que parfois ils ne comprenaient plus. Cela étant dit, leur "ignorance" est souvent une garantie de respect pour un corpus dont ils savent qu'il fait partie intégrante de leur identité. Ces sources, transmises par des manuscrits de diverses époques mais transcrites pour la première fois vers le VIIème ou le VIIIème siècle, ont pu être exploitées jusqu'au XVIIIème siècle par un auteur tel que Séathrún Céitinn et compilées jusqu'à la fin du XIXème. Enfin, on observera que les manuscrits qui nous sont restés contiennent toujours plus d'un récit en même que chaque récit apparaît le plus souvent dans plusieurs manuscrits d'époques différentes…

à suivre...

MessagePosté: Mar 04 Jan, 2005 1:43
de Fergus
suite :

Dès ce stade apparaissent nombre de motifs qui seront essentiels dans la constitution de la Matière de Bretagne :
· une solidarité entre le monde terrestre et l'Autre Monde fonctionnant s'appuyant sur un système de prestations et de contre-prestations, lesquelles font l'objet d'une geis (prescription, sort, malédiction… ; on a remarqué que le conflit, chez le héros, n'est jamais interne, il est toujours imposé de l'extérieur). Ainsi, la filiation royale et héroïque passe le plus souvent par une intervention de l'Autre Monde. Le fait de devoir taire son nom fait également partie de ces obligations et constitue la réciproque de la généalogie, science exercée par les poètes ("filid"), relevant de la première fonction… La geis déterminera plus tard aussi bien la quête du Chevalier errant que l'équipée des amants réprouvés.
· l'existence d'un compagnonnage guerrier (Finn et ses compagnons) qui pose simultanément le problème de souveraineté et de préséance (attesté, au Ier siècle par le géographe grec Posidonius) et trouve son fonctionnement dans le repas communiel à date précise ; la Table ronde, si elle n'apparaît pas avant Robert de Boron, vient pour partie de ces notions
· la libéralité du roi, obligatoire parce que garante de la prospérité du monde, de la pérennité des institutions, de la vie même (la sienne y compris), et symbolisée par le chaudron, la coupe d'immortalité qui traduit aussi l'ivresse du pouvoir (Medb); cette largesse royale trouve une compensation dans le fait que ses guerriers partent pour lui en quête d'objets ou talismans magiques
· ces talismans ou objets, dès les textes les plus anciens, sont clairement la pierre de Fal, pierre de souveraineté (qui deviendra le Siège périlleux), le chaudron du Dagda, (qui deviendra coupe d'immortalité, puis le Graal), la lance d'Ogme (qui tue et guérit), l'épée…
· les rapports entre les personnages par groupes de trois ou de deux : Finn, Diamuid et Grainne, les rivalités ou infidélités entre Ailill et Medb, Conchobar et Cuchulainn, la déficience royale et plusieurs caractéristiques du héros se retrouveront dans le schéma Arthur, Lancelot et Guenièvre ou encore Marc, Tristan et Iseult ; la complémentarité du couple que forment le roi et le druide (Arthur et Merlin), la racine même du nom du roi, les animaux qui les représentent (sanglier et ours…)
· le recours récurrent à des triades (groupe de trois éléments, encore), la symbolique des couleurs, la présence significative des oiseaux, messagers de l'Autre Monde
Autant d'éléments qui viennent en ligne directe des vieilles conceptions celtiques, conservées par l'Irlande et proposées sans altérations majeures jusqu'au Moyen-âge.

Une deuxième étape est représentée, au Pays de Galles, par les quatre branches du Mabinogi qui constituent le cycle mythologique gallois et par l'existence d'un cycle de contes épiques dans lequel Arthur est l'équivalent du roi irlandais Conchobar et son neveu Gwalchmai (qui deviendra Gauvain) celui de Cuchulainn. Mais le cadre n'a plus la même valeur que dans les récits irlandais : la société qui y est évoquée est christianisée, les personnages, dieux héroïsés, y gagnent une substance psychologique. Les récits sont plus littéraires, leur style plus travaillé, le propos devient plus franchement poétique mais le contenu mythique transparaît encore. Ces textes sont à la fois issus du fond mythologique celtique et inspirés par la littérature courtoise continentale. En Gereint et Enid, Owen et Llunet, Peredur Ab Evrawc… se retrouvent Erec et Enide, Yvain et Lunete, Perceval.

Les noms de Marc, de Tristan, de Pellès, etc. sont d'origine brittonique et plusieurs s'attacheront à des toponymes de la Grande ou de la Petite Bretagne.
En effet, il est également certain que la Bretagne insulaire puis armoricaine a peu à peu vu naître une tradition arthurienne dont les fondements historiques sont incertains et importent peu puisque, si jamais un ou plusieurs personnages ou événements (Ambrosius, bataille de Badon…) se trouvent mêlés à ce qui deviendra la Matière de Bretagne, ils sont aussi rapidement et sûrement absorbés par la légende en même temps que les anciens dieux celtiques ont été évhémérisés, héroïsés.
Ce qui importe beaucoup plus, c'est que, dans des lieux tels que l'abbaye de Glastonbury (de fondation celtique), se forgera pour les populations celtiques brittoniques (Galles, Domnonée c'est-à-dire Cornouailles et de là Armorique : la langue ne diffère pas à cette époque et les échanges économiques, culturels, etc. sont substantiels) le mythe d'un Roi, symbole de la résistance aux envahisseurs saxons, puis normands, voire francs. Faisant suite à l'Historia Brittonum attribuée à Nennius (IXème siècle, cependant commencé vers 600) et reprenant des éléments antérieurs, dont le Gododdin du VIIème siècle (et qui, en passant, mentionne pour la première fois le nom d'Arthur), se développe une littérature pseudo-historiographique dont les titres les plus connus sont ceux de Geoffroi de Monmouth : Prophetia Merlini (1134) et Historia Regum Britanniae (1136) et les textes de Giraud de Cambrie. Enfin, le succès continental de la Matière de Bretagne va bientôt influencer à son tour et en sens inverse, la littérature autochtone galloise et anglo-normande.
Les romans proprement dits et la tradition orale ont conservé certains éléments archaïques essentiels qui confèrent un rôle de simple repère à ces œuvres à visée panégyrique. On n'exagérera donc pas la volonté du Roi d'Angleterre de se constituer une "geste", tandis qu'Arthur est devenu un mythe politique constitutif du "patriotisme" de la société bretonne, pour employer les termes de Léon Fleuriot. On remarquera que, pour ce qui concerne Tristan, la Bretagne armoricaine apporte à son tour des éléments décisifs, dont le personnage de la seconde Izeut aux Blanches Mains.
Enfin, des éléments à l'origine exogènes finissent par intégrer et modifier ces traditions : d'une part la poésie occitane et sa fin' amor ainsi que l'héritage antique (Ovide et l'Art d'Aimer), d'autre part, la volonté de christianiser l'ensemble.
Le Christianisme qui a d'ailleurs pénétré l'héritage celtique gallois, va offrir une symbolique renouvelée voire une véritable mystique à ce corpus de croyances et de comportements. Les Croisades elles-mêmes offriront l'occasion de mettre en valeur, sinon à l'épreuve, la prouesse du chevalier et la fidélité de la dame ; elles entraîneront également, par le contact avec les Lieux Saints et, parallèlement, avec d'autres réalités de l'Orient comme la liturgie byzantine, une réactualisation des personnages tels que Joseph d'Arimathie ou des motifs tel que le cortège du Graal. Sur le plan religieux encore, il faut noter l'importance de l'esprit cistercien dans la diffusion et l'élaboration de cette littérature : l'alchimie qui va faire de Galaad le vainqueur de la Queste del Saint Graal passe par les cloîtres des fils de Bernard de Clairvaux ; de même qu'il n'est pas indifférent de noter la transposition du thème légendaire puis littéraire du Purgatoire à la théologie occidentale.

Aussi est-ce un véritable inventaire que la société médiévale du XIIème siècle tout à la fois reçoit, compose et utilise afin de jeter les bases d'un âge nouveau : à partir de cette Matière, l'Occident constitue une authentique "littérature-miroir" qui va la façonner durablement mais dans laquelle vont se refléter, avec de plus en plus d'acuité, sans doute une certaine allure mais aussi les grimaces mêmes de cette société et finalement jusqu'à ses rides. A la fois conservatoire très bien pourvu en avatars celtiques, creuset d'une sensibilité nouvelle à partir de ce que d'aucuns appelleront la "renaissance du XIIème siècle", témoin enfin d'un époque riche en événements majeurs pour l'Occident, la Matière de Bretagne ne peut se réduire à l'un de ces trois aspects et de très bonnes études, si elles ignorent tel ou tel de ces éléments, se révèlent franchement incomplètes.

à suivre...

MessagePosté: Mar 04 Jan, 2005 1:50
de Fergus
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B. Naissance d'une culture

1. Un environnement complexe
"Toutes les fois que l'on cherche à s'expliquer d'où est venue, comment s'est opérée cette fusion entre courtoisie, thèmes chevaleresques et mythes celtiques, on se trouve infailliblement ramené vers la cour d'Aliénor. Dans son sillage apparaissent les poètes qui rendront familiers non seulement Tristan et Yseut, mais Perceval et Lancelot, le roi Arthur et la fée Morgane, et la reine Guenièvre, et l'enchanteur Merlin." écrit Régine Pernoud.

Aliénor d'Aquitaine est la fille de Guillaume X d'Aquitaine et d'Aénor de Châtellerault; elle est aussi la petite-fille de Guillaume IX le Troubadour et de Philippa de Toulouse. De son père, qui entretient une cour de poètes et de musiciens à laquelle participe le gallois Blédhri, et de son grand-père, elle hérite non seulement toute la culture des troubadours mais déjà de la Matière celtique et de la légende arthurienne répandues en Europe continentale bien avant les succès d'auteurs comme Chrétien ainsi que l'attestent certains vestiges : des sculptures légendées (dans une graphie bretonne-armoricaine) sur le portail nord de la cathédrale de Modène et datant de la première moitié du XIIème siècle représentent huit personnages de la geste arthurienne, dont Arthur et Gauvain, tandis que Pio Rajna relève "le nombre des Arturius et des Walwanus figurant comme noms propres dans des chartes du Nord de l'Italie dès le début du XIIème siècle." (J. Marx)

Par son union avec Louis VII de France, d'où naîtront Marie, future épouse d'Henri I de Champagne et protectrice de Chrétien de Troyes, puis Alix, qui épousera Thibaud de Blois, puis par son second mariage avec Henri II Plantagenêt et qui lui donnera huit autres enfants, dont deux seront rois, Richard Cœur de Lion et Jean sans Terre, et quatre occuperont des positions très importantes : Mathilde, Geoffroy, Aliénor et Jeanne. Aliénor, deux fois reine, se trouve au centre d'un réseau grâce auquel la Matière de Bretagne se diffusera dans toutes les cours européennes.
Effectivement, en un demi-siècle, c'est-à-dire pendant la seconde moitié du XIIème siècle, la littérature arthurienne va s'étendre à l'Europe entière selon une progression qui tient beaucoup à la généalogie. Aussi, si l'on parle de littérature en français, il faut bien tenir compte de ce contexte européen, un contexte dans lequel la petite Bretagne tient elle aussi sa place.
Poitiers constitue un foyer important de cette diffusion puisque, avec ou sans le roi Henri, Aliénor y tient volontiers une cour que fréquentent des troubadours tels que Bernard de Ventadour ou Bertrand de Born , chantres de la "fine amor". Les intérêts d'Aliénor et d'Henri ne seront d'ailleurs pas toujours confondus, au point que le second fera emprisonner la première en Angleterre, aussi n'est-il pas nécessaire d'envisager que la Matière de Bretagne aurait été orchestrée par le roi d'Angleterre lui-même pour faire pendant à la geste des Français : de fait, les possessions et le prestige du roi de France semblent moins évidents jusqu'à l'avènement de Philippe-Auguste et le public le plus friand de cette littérature commande lui-même, en fournissant des canevas, la composition de ces lais ou romans.
Les dédicaces et autres prologues des différents lais et récits illustrent à l'envi d'une part que cette littérature est faite pour être dite, et pour être dite à quelqu'un qui l'apprécie, à l'exemple de ceux qui avaient pris l'habitude d'écouter les bardes , et d'autre part qu'il existe chez ces auditeurs comme chez les personnages dont ils ont à entendre une affinité, une connivence, une véritable intelligence de sentiments et de pensées.
Ainsi, en un demi-siècle très riche mais mouvementé et contrasté, va s'épanouir durablement une culture d'un grand raffinement, au moment même où, à Paris, Oxford, etc., l'Université commence à s'organiser, la scolastique et l'art gothique à prendre leur commun essor et tandis que se perpétuent d'antiques luttes féodales, que sévissent les famines (quatre grandes famines entre 1144 et 1197, la dernière se produira en 1224-1226), que se déchaînent les Croisades, d'abord contre l'Islam (cependant Pierre le Vénérable fait traduire le Coran en latin en 1141), mais bientôt contre les Albigeois (1209) et contre Constantinople (1204). Au cœur de cette époque tourmentée, vers 1190, le moine Joachim de Flore s'appuie sur les Ecritures pour annoncer la fin du monde pour 1260…
De fait, d'ici là, le monde aura véritablement et durablement été bouleversé.

à suivre...

MessagePosté: Mar 04 Jan, 2005 1:53
de Fergus
2. D'un héros, l'autre.

1147-1149 - 2nde Croisade, prêchée en 1146 par Bernard de Clairvaux . La 1ère Croisade avait eu lieu de 1095 à 1099 et s'était terminée par la prise de Jérusalem. En 1149, le Comte Thierry de Flandre, père de Philippe qui commandera à Chrétien d'écrire son Perceval, apporte à Bruges la relique du Saint-Sang (le contact avec l'Orient chrétien, notamment la liturgie byzantine, donnera une nouvelle interprétation à la symbolique et au cortège du Graal).
1152 - mariage d'Aliénor avec Henri II Plantagenêt Frédéric Barberousse est élu à la tête du Saint-Empire (couronné à Rome en 1155, ville qu'il pillera 10 ans plus tard, il mourut au cours de la Croisade en 1190) Pierre Lombard : Livre de sentences, recueil de textes scolastiques
1153 - Mort de Bernard de Clairvaux.
1154 - accession d'Henri II au trône d'Angleterre
1155 - Wace : Roman de Brut, dédié à Aliénor (Brut, supposé ancêtre d'Henri, aurait lui-même pour ascendants Brutus, premier roi d'Angleterre, et Enée)
vers 1160 : premiers 'romans' (cad récits en langue française, inspirés de l'Antiquité, particulièrement d'Ovide, et composés sinon pour la cour d'Angleterre, au moins dans un milieu anglo-normand : le Roman de Troie, de Benoît de Sainte-Maure, le Roman de Thèbes, le Roman d'Enéas
vers 1165 - Marie de France : Les Lais
1170 - Meurtre de Thomas Beckett à l'instigation d'Henri II (une Vie de Thomas Beckett sera composée 1175) - Aliénor et ses fils Richard Cœur de Lion et Jean sans Terre soutiennent ou dirigent les révoltes contre le roi ; la reine est emprisonnée en 1174. Vers 1170 - Première œuvre de Chrétien de Troyes : Erec et Enide Tristan de Thomas
1175 - Roman de Renart
1178 - Etienne de Fougères, le Livre des Manières
1180 - accession au trone de Philippe-Auguste (jusque 1223)
vers 1180 - Tristan de Béroul
1181 - Dernière œuvre de Chrétien de Troyes : Perceval
1184 - institution de l'Inquisition épiscopale
vers 1186 - André le Chapelain : Traité de l'Amour courtois (Tractatus de Amore, De Arte honeste amandi)
1189 - mort d'Henri II 1189-1192 - 3ème Croisade ; mort à Saint-Jean d'Acre de Philippe d'Alsace, Comte de Flandre (né vers 1140- mort en 1191), l'un des féodaux les plus puissants de son temps et commanditaire nommé de Chrétien ; l'intervention française dans sa succession conduira à la bataille de Bouvines, où Philippe et Jean s'affronteront, mais par la revanche flamande à Courtrai (1302) entraîne aisément jusqu'aux lisières de la guerre de Cent Ans (1337-1453)
1191 - "invention" des tombes d'Arthur et de Guenièvre à l'abbaye de Glastonbury
1202-1204 - 4ème Croisade (qui, détournée de sa destination, aboutit au sac de Constantinople ; ces expéditions ne prirent fin qu'avec la 9ème Croisade, en 1271-1272)
1204 - Mort d'Aliénor à l'abbaye de Fontevraud

à suivre...

MessagePosté: Mar 04 Jan, 2005 2:00
de Fergus
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C. Quelques œuvres importantes

1. De Marie de France et Chrétien de Troyes à l'héritage européen.

Sur les douze Lais qu'écrivit Marie de France, tous sont plus ou moins liés à la Bretagne puisque dans le cas où l'action se déroule ailleurs (Les Deux Amants), une composition par "li Bretun" est évoquée, et dans le cas où l'inspiration est sans doute étrangère à la Matière celtique (Bisclavret), Marie situe néanmoins l'action en Bretagne… Bretaine la Meinure, la Petite Bretagne, est expressément nommée (Guigemar, Eliduc) quand ce ne sont pas les noms mêmes de villes qui nous sont donnés : Dol Le Frêne, Saint-Malo L'Aüstic, Nantes Le Chaitivel. Les autres pays celtiques sont également mentionnés Milon, d'autant que deux Lais se rapportent directement au Roi Arthur et Yvain Lanval ou à Tristan Le Chèvrefeuille, dont c'est la première introduction dans les œuvres en langue d'oïl. La tradition celtique est sans doute directement sollicitée dans Guigemar (avec sa chasse au cerf blanc), Yonec (avec son héros prenant la forme d'un oiseau, sa colline qui ouvre sur l'Autre Monde) et Eliduc, même si les motifs peuvent se retrouver dans des contes d'origines diverses.
L'art de Marie, auteur sensible et discret, est de traiter une substance légendaire avec beaucoup d'élégance et de contribuer, avec trop peu de reconnaissance, à l'élaboration perpétuelle d'un authentique patrimoine littéraire.
De Chrétien de Troyes, sont principalement conservés Erec et Enide, Cligès, Lancelot, Yvain et le début de Perceval ; un roman du Roi Marc et d'Ysalt la blonde, des œuvres inspirées d'Ovide sont perdus ; deux chansons courtoises lui sont en outre attribuées tandis que sa paternité quant au Guillaume d'Angleterre est contestée. Comme Marie de France, Chrétien, pour répondre à la commande des seigneurs le protégeant, met "en roman" (c'est-à-dire en vers français) la Matière que lui fournissent ses mécènes, à charge pour lui d'en tourner "une moult belle conjointure".
Dans Erec, inspiré de la tradition celtique, l'auteur introduit les premiers éléments psychologiques de la littérature française : "A présent le roman est né … et appelé aux plus grandes destinées." (Gustave Cohen). Après avoir épousé la belle Enide, le vaillant Erec se voit suspecté de "récréance" (lâcheté, renoncement) et doit se lancer dans de nouvelles aventures pour montrer à sa femme qu'elle se trompait.
Si Cligès nous entraîne jusqu'à Constantinople, le premier héros, Alexandre, rencontre bientôt Arthur et Guenièvre et s'éprend de Soredamor ("blonde d'amour"), fille d'honneur de la reine. Le second héros, Cligès, fils de Soredamor et neveu de l'empereur Alis, finira par épouser Fénice, promise à ce dernier sans que l'honneur n'y perde rien. Certains critiques (W. Foerster, E. Köhler, etc.) ont voulu voir dans Cligès un anti-Tristan; d'autres (Siciliano) un super-Tristan, certains enfin (G. Paris, A. Micha), un Tristan "revu et corrigé" pour se conformer aux goûts de l'époque.
Le Chevalier à la Charrette (Lancelot) et Le Chevalier au Lion (Yvain) sont souvent évoqués pour leur parallélisme. Dans le premier, l'auteur exerce son talent sur une "matière" qui lui est fournie par Marie de Champagne et avec laquelle il prend peut-être quelque distance ; il n'en est que plus libre pour se consacrer à la forme si variée de cette aventure qui voit Lancelot partir au secours de la reine Guenièvre et en tomber éperdument amoureux. Surmontant une série de périls, y compris les épreuves imposées par Guenièvre, il sauve l'honneur de son nom et fait triompher la conception courtoise : "Moult est qui aime obéissant."
L'auteur a confié à Godefrroy de Lagny le soin de rédiger la fin de Lancelot : surcroît de travail ? désintérêt ? Toujours est-il que Chrétien semble écrire à la même époque son Yvain, inspiré du légendaire celtique, et dans lequel il traite encore des rapports entre l'amour et la réputation guerrière.
Alors que ses exploits à la fontaine de Barenton lui ont fait trouvé l'amour de Laudine, Yvain quitte bientôt celle-ci pour renouer avec sa vie aventureuse, accompagné d'un lion qu'il a sauvé. Oubliant la promesse qu'il a faite de revenir auprès de sa dame, il devient fou mais, lui aussi, après un certain nombre d'épreuves, il finit par trouver le pardon de Laudine.
Avec Perceval ou le Conte du Graal, le conflit entre l'amour (Blanchefleur) et la prouesse s'efface pour laisser la place à une véritable recherche d'accomplissement, d'identité. Ayant omis de poser à propos les bonnes questions, Perceval se contraint et contraint le monde qui l'entoure (le Roi Pêcheur) à attendre la délivrance, voire la Rédemption. Ce roman, présentant en parallèle les quêtes de Perceval et de Gauvain, a fourni plusieurs interprétations, d'autant que Chrétien n'a pu l'achever. Mais il est clair qu'avec lui, le Christianisme transforme définitivement le substrat celtique et que ce qui constituait un ensemble de récits liés à des croyances devient autonome. Comme l'écrit G. Cohen, revenant sur l'apport de Chrétien à la culture de l'Occident, "le roman était définitivement né en tant que genre et surtout il était désormais apte, non seulement à exciter la curiosité et à imaginer l'imagination, mais à présenter dans un cadre irréel un tableau réel des mœurs et de la civilisation d'un temps. De ce temps, il se trouvait même prêt à discuter les idées, non sous forme de dissertation pédante et scolastique, mais en action et par personnages : le roman psychologique, le roman à thèse était créé."
Parmi les romans inspirés des aventures de Perceval, deux au moins méritent une attention particulière. Il s'agit de Perlesvaux et de la Queste del Saint Graal.
Le premier, écrit au début du XIIIe siècle par un anonyme, se veut un Haut Livre du Graal dicté par un ange ; c'est en tout cas l'un des premiers textes en prose française offrant également au lecteur un foisonnement d'aventures des plus pittoresques, imprégnées de symbolique. Le second, sans doute composé par un ou des disciples de Bernard de Clairvaux, constitue un aboutissement puisque l'inspiration chrétienne impose une lecture exclusivement mystique de la Quête.
Enfin, autre thème majeur de la Matière de Bretagne, le destin de Tristan et Iseult nous est principalement connu par les textes de Béroul et de Thomas. J. Bédier a vu dans le texte de Béroul une "version commune" et dans celui de Thomas une "version courtoise". En fait, le premier texte insiste davantage sur l'intrigue, abondant en épisodes secondaires, et sur la façon dont l'auteur, par ses procédés narratifs, l'offre à son auditoire, en réclamant son indulgence pour les amants. Avec Thomas, le destin de Tristan est davantage assumé par celui-ci, avec l'ensemble de ses composantes psychologiques et jusque dans ses conséquences les plus contraires : mariage avec Iseut aux Blanches Mains, marche inexorable vers la mort. Avec son aspect plus rhétorique et ses dialogues, le roman de Thomas inaugure la longue postérité romanesque du "discours amoureux".

à suivre...

MessagePosté: Mar 04 Jan, 2005 2:13
de Fergus
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2. Rôle fondateur de la Matière de Bretagne pour la littérature européenne.

De la chronologie qui suit (bâtie principalement à l'aide de celles figurant dans "La Littérature Arthurienne" de Thierry Delcourt, "Tristan et Yseut, les premières versions européennes" publié sous la direction de Ch. Marchello-Nizia et "La Légende arthurienne - Le Graal et la Table Ronde", publié sous la direction de D. Régnier-Bohler), on retiendra surtout, plus que le détail, le foisonnement des œuvres se rapportant à la Matière de Bretagne, leur rapprochement dans le temps et leur étendue dans l'espace, le phénomène généralisé de réécriture constitutif alors d'une véritable culture européenne.

800 approx. Nennius : Historia Brittonum - existence de récits celtiques d'où vont naître Diarmuid et Grainne et Tristan et Iseult
950 au moins Annales Cambriae
1100 approx. Guillaume de Malmesbury : Gesta Regum Anglorum
1134 Geoffroy de Monmouth : Prophetiae Merlini
1135 Cernamon : poèmes illustrant l'histoire de Tristan et Iseult
1135 approx. Geoffroy de Monmouth : Historia Regum Britanniae
1140 Bernard de Ventadour : poème faisant référence au destin de Tristan et Iseult
1145-1160 Caradoc de Llancarvan : Vita Gildae
1150 approx. Geoffroy de Monmouth : Vita Merlini
1155 Wace : Roman de Brut
1160 approx. Marie de France : Lais
1170 Eilhart d'Oberg : Tristant
1170 approx. Chrétien de Troyes : Erec et Enide
1175 approx. Thomas : Tristan
1176 approx. Chrétien de Troyes : Cligès
1177-1181 Chrétien de Troyes : Yvain, le Chevalier au Lion ; Lancelot, le Chevalier à la Charrette
1170-1190 Eilhart d'Oberg : Tristan
1180 approx. Béroul : Tristan
1180-1185 Hartmann von Aue : Erec
1181-1190 Chrétien de Troyes : Perceval, le Conte du Graal
1189-1205 Layamon : Brut
1190 approx. Tyolet ; Le Donnei des Amanz
1194-1205 Ulrich von Zatzikhoven : Lanzelet
1200 au plus La Folie Tristan (version de Berne) ; La Folie Tristan (version d'Oxford)
1200 approx. Renaud de Beaujeu (de Bâgé) : Le Bel Inconnu ; Les Enfances de Gauvain ; le Livre de Caradoc (Première Continuation du Conte du Graal - première version) ; Le Roman de l'Estoire dou Graal ; Robert de Boron : Merlin (en vers); Raoul de Houdenc (?) : La Vengeance Raduigel ; Hartmann von Aue : Iwein ; Robert Biket : Le Lai du Cor
1200-1210 Gottfried de Strasbourg : Tristan et Isolde ; Le Chevalier à l'Epée ; Païen de Maisières : Le Demoiselle à la Mule ou La Mule sans Frein
1200-1225 Le Mantel mautaillié ; Mériadeuc, le Chevalier aux Deux Epées ; Merlinnusspa (trad. islandaise des Prophéties de Merlin)
1205 approx. Wolfram von Eschenbach : Parzifal
1205-1210 Wauchier de Denain (?) : Deuxième Continuation du Conte du Graal ; Wirnt von Grafenberg : Wigalois
1210 approx. Robert de Boron : Perceval (en prose) ; Joseph ; Merlin ; Perlesvaus ; Breta Sögur (Sagas des Bretons)
1200-1220 Raoul de Houdenc : Méraugis de Portlesguez ; Thomasin von Zirclaere : Der welsche Gast ; Wolfram von Eschenbach : Willehalm
1217-1263 Le roi de Norvège Haakon IV fait traduire de nombreux textes arthuriens en norrois (Ridderarasögur : Sagas de Chevaliers, comprenant la Saga de Tristram et Isönd)
1220 approx. Heinrich von dem Türlin : Diu Crône ; Durmart le Gallois
1220-1225 Lancelot "propre" (Vulgate)
1220-1230 Estoire del Saint Graal ; Queste del Saint Graal ; Mort le Roi Artu ; Estoire de Merlin ; Suite de Merlin (Vulgate)
1225 approx. Gliglois ; Jauffré (?)
1226 Frère Robert : Tristramsaga ok Isöndar
1225-1250 Yder
13ème siècle Le Valet à la Cote mal taillée ; Le Chevalier Melior ; Merlin Merlot ; Tristan le Moine ; romans gallois de Peredur, Geraint et Enid, Owain ; Fenian (Ossianic) Lais (Irlande et Ecosse : Hebrides)
1230 approx. Troisième et Quatrième Continuations du Conte du Graal ; Ulrich von Türnheim : Continuation du Tristan de Gottfried de Strasbourg
1230-1260 Robert de Blois : Beaudous
1235 au moins Le Livre d'Artus
1237-1241 ? Guillaume Le Clerc : Fergus
1240 approx. Tristan (en prose) ; Cycle Post-Vulgate ; Guiron le Courtois
1250 approx. L'Atre périlleux ; Hunbaut ; Claris et Laris ; Le Roman de Silence ; Strengleikar (traduction de Lais dont onze sont tirés de Marie de France) ; Percevals saga ; Tristan le Nain
1250 au moins Fouke Fitz Warin
1250-1275 Floriant et Florette
1260 approx. Le Roman de Laurin
1270 approx. Les Merveilles de Rigomer
1272-1298 Compilation de Rusticien de Pise
1280 approx. Girart d'Amiens : Escanor
1290-1300 Heinrich von Freiberg : Continuation du Tristan de Gorrfried de Starsbourg
1294 approx. Baudoin Butor : Le Roman des Fils du Roi Constant
1300-1340 Artus de Bretagne ; Sir Perceval of Galles ; Yvain (en prose) ; Sir Tristrem ; Tristano Riccardiano
1325-1350 La Tavola Ritonda
1330 approx. Blandin de Cornouailles
1337-1344 Perceforest
1375 approx. Sir Gawain and the Green Knight ; Das altceschische Tristan-Epos
1383-1388 Jean Froissart : Méliador
1400 approx. Le Chevalier du Papegai ; Ysaÿe le Triste ; Morte Arthure (allitérative) ; Tristrams Kvoedi (islandais) ; Tristram og Isodd (Danemark) ; Tristrams Tattur (Iles Féroë) …
1470 Compilation de Micheau Gonnot
1471 au plus Thomas Malory : La Morte Darthur
1525 Le Chevalier au Lion ; Pierre Sala : Tristan
1553 Hans Sachs : Tristan mit Isalde
1554 Jean Maugin : Le Nouveau Tristan
1580 Tristan et Iseut (serbo-croate : codex de Poznan, d'après le Tristan en prose)

à suivre...

MessagePosté: Mar 04 Jan, 2005 2:15
de Fergus
suite et fin :

3. Des retours à la Matière de Bretagne dans les temps de crise.

Si la chronologie qui précède s'arrête au XVIe siècle, c'est surtout pour illustrer l'étendue géographique et linguistique de l'influence qu'exerça très vite la Matière de Bretagne.
Cependant, personne n'ignore que cette influence, loin de s'arrêter dans le temps, reprendra de plus belle avec le Romantisme et tous ses épiphénomènes. Après un temps de dérision s'étendant de Jean de Meun (1275 approx.) à Cervantes (1605-1615), la culture humaniste et classique allait faire un moment oublier le légendaire d'Arthur et de Tristan, légendaire qui n'en survivrait pas moins à des degrés divers dans les différents domaines de la tradition populaire européenne. Puis la nostalgie d'origines pré-rationalistes allait entraîner la résurgence de cette thématique : d'un bout à l'autre du XIXe siècle, l'Allemagne et l'Angleterre seraient sans doute plus marquées que la France, sortant de l'époque des Lumières.
Il n'empêche que la culture française, sous l'effet de plusieurs influences dont celle du Surréalisme, et à la faveur des commotions et des "refondations" du XXe siècle, reconnaîtrait finalement cet héritage : L. Aragon (La Leçon de Ribérac ou l'Europe française, 1941 ; Brocéliande, 1942), J. Cocteau (L'Eternel Retour, 1943-1944), J. Gracq (Le Roi Pêcheur, 1948), etc.
Si pour certains créateurs et commentateurs, notamment en période de crise, il s'agit là d'un retour à l'essence même de l' "unité française" (Aragon), tandis que d'autres y voient le "réveil de la Celtie" (J.-P. Calloc'h, Th. Briant, X. de Langlais…), c'est de plus en plus clairement d'un véritable patrimoine européen qu'il s'agit et c'est sans doute aujourd'hui la façon la plus fidèle et la plus féconde de l'aborder.

MessagePosté: Mar 04 Jan, 2005 12:05
de Marc'heg an Avel
Salut Fergus,

Soyons riches de connaissances. Voici donc une partie de contribution tirée de mes notes de Emgann Karaez, concernant les noms de personnes de l'époque des croisades :

*********************

a) issus de l'histoire, authentifiée et vérifiée

Moyen-age & Époque des croisades :

Alain : Nom de plusieurs princes de Petite Bretagne :

- Alain Ier : Duc de Bretagne, avec Judicaël, de 877 à 907.

- Alain II Barbetorte : Petit-fils d'Alain le Grand, par l'une de ses filles dont le nom nous ne est pas connu, épouse de Matuédoi, comte de Poher. Duc de Bretagne à partir de 937.

Il a épousé successivement :

1. ? d'Anjou, dont il a eu ?;

2. ? soeur de Thibault le Tricheur, comte de Chartres, dont il a eu un fils: Drogon.

3. d'unions illégitimes avec ?1 et ?2 , il a eu Guerech et Hoël (comte de Nantes).

Alain Barbetorte est mort à Nantes en 952; son fils Drogon lui succède, mais décède l'année suivante (DUHG), en 958 (H.Poisson. Histoire de Bretagne, p 66), mort qui provoque une guerre de succession entre Hoël Ier et Conan Ier le Tort.

- Alain III : Duc de Bretagne de 1008 à 1040. Son fils Conan II lui succède.

- Alain IV Fergent : Fils de Hoël de Cornouaille et d'Havoise de Rennes. Né en 1084. Comte de Cornouaille et de Nantes du chef de son père, puis de Rennes du chef de sa mère. Il épouse en premières noces Constance, fille de Guillaume le Conquérant, qui décède sans descendance en 1090, puis en deuxièmes noces Ermengarde d'Anjou en 1093, qui lui donne Conan. En 1112, il abdique en faveur de son fils Conan III le Gros, gendre d'Henri Ier d'Angleterre. Alain IV Fergent est mort à l'abbaye de Redon.

Aliénor d'Aquitaine (Eléonore de Guyenne) : Fille de Guillaume X, dernier duc d'Aquitaine et d'Aénor de Châtellerault. Née à Nieul-sur-l'Autise, en 1122. Duchesse d'Aquitaine et comtesse de Poitou à la mort de son père, en 1137.

Elle épouse en premières noces Louis VII, roi de France, le jeudi 22 juillet 1137, à l'âge de 15 ans et à qui elle donne deux filles : Marie de Champagne et Alix. Celui-ci en obtient cependant le divorce au concile de Beaugency, en 1152, apparemment pour cause de relations incestueuses entre Aliénor et son oncle Raymond Ier d'Antioche..

Elle épouse aussitôt en secondes noces Henri Plantagenêt, duc de Normandie et comte d'Anjou, et qui va devenir roi d'Angleterre sous le nom d'Henri II. Elle lui a donne : Henri 'le Jeune', dit 'Court-Mantel', Mathilde, Richard Coeur de Lion, Geoffroy, Aliénor, Jeanne, Jean sans Terre.

Par Geoffroy, Aliénor d'Aquitaine est donc la grand-mère d'Arthur Ier de Bretagne (voir ce nom), destiné à devenir roi de l'empire Plantagenêt.

Aliénor d'Aquitaine est décédée à l'abbaye de Fontevrault (Fons-Ebraldi / Font-Evrault), en 1204.

Aliénor, Demoiselle de Bretagne : Fille de Geoffroy et de Constance de Bretagne. Née en 1184; tenue en captivité par son oncle Jean sans terre; décédée au château de Bristol le samedi 10 août 1241; inhumée d'abord à l'église Saint-Jacques de Bristol, puis transférée à Amesbury.

Arthur : Nom de plusieurs princes de Petite Bretagne :

- Arthur Ier de Bretagne : Fils posthume de Geoffroy et de Constance. Né à Nantes (?) le dimanche 29 mars 1187 (Burke's Guide) ou le jeudi 30 avril 1187 (Brékilien, Hist de Bret, p 134). Désigné successeur de Richard Coeur de Lion au trône d'Angleterre le dimanche 11 novembre 1190. Marié à Marie de France, fille de Philippe Auguste et Agnès de Méranie. Soutenu par Philippe Auguste contre Jean sans terre. Lors du siège de Mirebeau, en Poitou, Arthur est trahi par un chevalier français, Guillaume des Roches, le jeudi Ier août 1202, puis livré à Jean sans terre, son oncle paternel et à la fois compétiteur au pouvoir royal et qui, après de multiples tentations de persuasion à la renonciation au trône de l'empire Plantagenêt, le fait assassiner dans la nuit du mercredi 02 au jeudi 03 avril 1203, à Rouen. Arthur Ier de Bretagne a été inhumé à l'abbaye de Bec, en Normandie.

- Arthur II, Fils du duc Jean II et de Béatrice d'Angleterre - Angoulême; duc de 1305 à 1312.

- Arthur III, Fils du duc Jean IV et de Jeanne de Navarre (?); duc de1457 à 1458.

Barberousse : voir Frédéric Ier.

Beaumont (Robert de, dit Le Bossu) : 2ème earl de Leicester. Père d'Havoise, comtesse de Gloucester, épouse de Guillaume, ces derniers étant eux-mêmes les parents d'Isabelle de Gloucester, Ière épouse de Jean sans terre.

Boron (Robert de) : A. Micha: probablement seigneur (du village de Boron ?) de la région de Montbéliard (jadis chef-lieu de comté entre la Franche-Comté, la Lorraine, l'évêché de Bâle et le Sundgau; aujourd'hui chef-lieu d'arrondissement du Doubs).

Le village de Boron fait partie du canton de Grandvillars (sud-est de Belfort) et a été dépendant de la paroisse de Grosne jusqu'en 1858, date après laquelle il est devenu une paroisse autonome. On y parlait un patois d'oïl.

C'est à Robert de Boron que l'on attribue l'introduction dans les romans arthuriens des thèmes du Saint-Graal et de Joseph d'Arimathie, après avoir largement puisé son inspiration dans les oeuvres de Geoffroy de Monmouth (Prophetiae Merlini, c 1132-1134; Historia Regum Britanniae, c 1135-1138; Vita Merlini, c 1148-1150), de Wace (Roman de Brut, c 1155) et de l'évangile apocryphe de Nicodème.

Le destinataire de l'Estoire dou Graal était apparemment, selon l'indication de Robert de Boron lui-même, Gautier, comte de Montbéliard, frère de Richard III de Montfaucon, tous deux issus du premier mariage d'Amédée de Montfaucon avec Béatrix (de Grandson, de la maison de Joinville). Ils étaient également apparentés à la famille de Brienne, qui détenait le comté de Bar (Jean de Brienne était neveu d'Amédée de Montfaucon). Or, cette famille était elle-même liée à celle de Dreux par le mariage de Robert Ier de Dreux, dit le Grand, (+ 11 octobre 1188) avec Agnès de Baudemont, veuve du comte de Bar. Par la suite, en 1187, Érard II de Brienne a participé à la troisième croisade avec Robert II, comte de Dreux et Philippe de Dreux, celui-ci étant alors évêque de Beauvais. Gautier de Montbéliard, de la génération suivante, est parti avec son frère en 1201 pour la quatrième croisade. Il a été nommé connétable de Jérusalem par son cousin Jean de Brienne, alors roi de Jérusalem. Gautier de Montbéliard est mort en croisade en 1212.

Les poètes qui ont travaillé le thème du Graal, en particulier Chrestien de Troyes et Robert de Boron, ont donc comme point commun l'évêque ou l'évêché de Beauvais.

Clément III (Paolo Scolari) : d'origine romaine. Cardinal-évêque de Préneste / Palestrina, succède au pape Grégoire VIII, décédé le jeudi 17 décembre 1187. Élu pape le dimanche suivant, 20 décembre 1187. Décédé à Rome le samedi 30 mars 1191.

C'est lui qui a introduit la coutume d'élever l'hostie et le calice lors de la consécration, en attirant l'attention des assistants par un tintement de clochettes. Cette décision constitue la réponse officielle de l'Église à la mise en place de la symbolique du Graal préparée par les poètes quelques années auparavant, en particulier par Robert de Boron. Voir ce nom.

Chrestien de Troyes : Poète et romancier, né (probablement) à Troyes, en Champagne, vers 1135. Il est mort avant 1190.

Il se trouve d'abord sous la protection de la cour du comte de Champagne Henri Ier le Libéral, sous la protection particulière de la comtesse Marie. De cette époque, il a laissé : Ovidiana (c.1158), Philomena (c.1158), Guillaume d'Angleterre (c.1160), Erec et Enide (c.1160-1164), Cligès ou La Fausse Morte (c.1170), Lancelot du Lac ou le Chevalier à la charrette (c.1165), qu'il dédie à sa protectrice.

Il se place ensuite sous la protection de la cour du comte de Flandres ou règne le comte Philippe d'Alsace (c.1168). De cette époque, il a laissé : Yvain ou le Chevalier au lion (c.1170), Perceval le Gallois ou le conte du Graal (c.1181-1182).

De l'aveu même de Chrestien, il s'est inspiré d'un manuscrit de la bibliothèque de St-Pierre de Beauvais pour rédiger Gligès ou la Fausse Morte. Voir alors le recoupement avec Guillaume le Breton et Robert de Boron.

Conan (= prince, chef): Nom de plusieurs princes de Petite Bretagne.

- Conan Ier le Tort : Fils de Juhel Béranger et de (?); duc de Bretagne à partir de 952; tué à la bataille de Coquereuil le lundi 27 juin 992.

- Conan II : Fils d'Alain III et de Berthe de Chartres; duc de Bretagne en 1040, sous la régence de son oncle Eudes; il reprend effectivement le pouvoir en 1055/56, à l'âge de quinze ans. Mort (empoisonné ?) devant Château-Gontier en 1066, sans descendance.

- Conan III le Gros : Fils d'Alain Fergent et d'Ermengarde d'Anjou; duc de Bretagne de 1112 à 1148. Il épouse Mathilde, fille naturelle du roi d'Angleterre Henry Ier, dont il a un fils : Hoël, qu'il désavoue peu avant sa mort. Il épouse en 2èmes noces Berthe.

- Conan IV : Fils d'Alain le Noir, comte de Richemont et de Berthe de Bretagne; duc de Bretagne de 1156 jusqu'à son abdication en 1166. Il est décédé en 1171. Il a épousé Margaret, fille d'Henry comte d'Huntingdon et dont il a eu une fille, Constance, qui sera mariée à l'âge de cinq ans à Geoffroy Plantagenêt qui n'en avait que huit.

Constance : Fille de Conan IV le Petit, duc de Bretagne et de Margaret de Huntingdon. Née en (?) 1161. Mariée encore enfant, à l'âge de cinq ans, à Geoffroy Plantagenêt, lui-même âgé seulement de huit ans, fils d'Henri II d'Angleterre et d'Aliénor d'Aquitaine. Elle lui donne successivement Aliénor et à titre posthume Arthur Ier de Bretagne.

Après la mort de Geoffroy, elle est contrainte par Henry II d'Angleterre d'épouser, en 1186/88 Ranulph Blundeville, 4ème comte de Chester. La mariage est déclaré illégal par les États de Bretagne et dissout, après la mort d'Henry II, survenue à Chinon le jeudi 06 juillet 1189. Il n'y a pas eu d'enfants de cette union.

Elle épouse enfin Guy de Thouars, à qui elle donne trois filles : Alix (héritière de Bretagne, qui épousera Pierre de Dreux, dit Mauclerc, (sur injonction de Philippe Auguste, roi de France), Catherine et Marguerite.

Constance est décédée à Nantes, le mardi 04 septembre 1201. Elle est inhumée à Villeneuve (?).

Frédéric Ier, dit Barberousse : Empereur d'Allemagne (Saint-Empire romain-germanique).

Né en 1221. Proclamé empereur, en 1152, à la mort de son oncle Conrad III. Réconcilié avec le pape, il établit avec Lucius III le principe d'une troisième croisade. Il prend lui-même la Croix et le commandement de l'armée chrétienne. Il part de Ratisbonne le jeudi 11 mai 1189. Il est mort à Tarse, en Cilicie, le dimanche 10 juin 1190, noyé dans les eaux du Sélef / Cydnus (Calycadnus).

Geoffroy : Nom de plusieurs ducs de Petite Bretagne :

- Geoffroy Ier : Fils de Conan Ier le Tort et de (?); épouse Havoise, soeur de Richard de Normandie; mort en pèlerinage à Rome en 1008. Il a eu deux fils : Alain et Eudes. Son fils aîné lui succède, sous le nom d' Alain III, sous la régence de sa mère.

- Geoffroy II : Fils de Henri II Plantagenêt, roi d'Angleterre et d'Aliénor d'Aquitaine. Né à (?), le mardi 23 septembre 1158. Duc de Bretagne en 1169, sous l'autorité de Henri II d' Angleterre. Encore enfant, il est marié à Constance de Bretagne, elle-même enfant, fille unique de Conan IV le Petit. Il devient duc de Bretagne jure uxoris en 1171, mais ne détient réellement le pouvoir qu'en 1181. Constance lui donne Aliénor (du nom de la grand-mère paternelle) et, à titre posthume, Arthur Ier de Bretagne. Allié fidèle de Philippe Auguste, y compris contre son propre père Henri II, Geoffroy meurt accidentellement au cours d'un tournois à Paris, le mardi 19 août 1186. Il est inhumé à Notre-Dame de Paris. Son fils Arthur Ier lui succède, sous la régence de sa mère.

Geoffroy de Monmouth (Gaufridus Monemutensis) : Historien breton qui, selon certains, est originaire de l'actuel Pays de Galles, selon d'autres de la Bretagne armoricaine.

Selon G.M Oury (Les provinces de l'Ouest..., p 220), Geoffrey de Monmouth " ...est né vers l'année 1100 à Monmouth, d'un prêtre du nom d'Arthur, et reçut sa formation littéraire de son oncle Uchtryd qui devait devenir par la suite évêque de Llandaff. Son enfance a été bercée par les récits de la première Croisade".

Il réside à Oxford de 1129 à 1151, où il exerce apparemment la fonction de chanoine du collège Saint-Georges. Il est ensuite élu évêque de Saint-Asaph (en Flintshire) vers 1151, puis prieur de Westminster à la mi-février 1152 et consacré en cette fonction à Lambeth le 24 du même mois par l'archevêque Theobald. Geoffroy de Monmouth est mort apparemment à Londres en 1154 ou 1155.

Il a écrit, vers 1135 une Prophéties de Merlin (Prophetia Merlini), puis entre 1135 et 1138, une Histoire des rois de Bretagne (Historia Regum Britanniae), puis en 1148, une Vie de Merlin (Vita Merlini).

Guillaume le Breton : Historien et poète, né en Léon de Bretagne armoricaine (Abbé Poisson, Histoire de Bretagne, p 93), vers 1165, alors que Conan le Petit est duc de Bretagne. Surnommé Armoricus ou Brito-armoricus. Remplit les fonctions de chapelain, de conseiller intime, puis d'historien de Philippe-auguste. Il est mort vers 1227, en qualité de chanoine de Senlis. Il a été le témoin oculaire de la plupart des faits qu'il a racontés (NLI.DUE). Il a laissé Histoire des Gestes de Philippe-auguste et la Philippique, poème en 12 livres.

Henri Ier Beauclerc (Dei Gratia Rex Anglorum) : 4ème fils de Guillaume le Conquérant; né à Selby en fin 1068; usurpateur du trône d'Angleterre au détriment de Robert Courte-heuse et couronné à Westminster le lundi 06 août 1100. Il triomphe de son frère à la bataille de Tinchebray, en Normandie, le vendredi 28 septembre 1106.

Il a épousé successivement :

- Edith / Mathilde, fille cadette de Malcom III Canmore d'Écosse, le dimanche 11 novembre 1100, qui lui donne : Guillaume (duc de Normandie) et Richard, morts tous les deux noyés en Manche le jeudi 25 novembre 1120;

- Adelize, fille de Godfrey Ier le Barbu, duc de Basse-Lorraine;

Henri Ier est décédé à Saint-Denis-le-Fermont, près de Rouen le dimanche Ier décembre 1135, à l'âge de 67 ans. Il est inhumé à l'abbaye de Reading. Son neveu Etienne lui succède.

Henri II Courtmantel (Rex Angliae, Dux Normanniae et Aquitaniae et Comes Andegaviae) : Fils de Geoffroy Plantagenêt, comte d'Anjou et de Mathilde, fille d'Henri Ier. Succède à son père en qualité de duc de Normandie et comte d'Anjou en 1151. Duc d'Aquitaine jure uxoris par son mariage avec Aliénor, en 1152. Désigné successeur d'Etienne en 1153. Après la mort de celui-ci, à Douvres, le lundi 25 octobre 1154, Henri est couronné roi d'Angleterre, à Westminster, sous le nom Henri II, le dimanche 19 décembre 1154, à la mort d'Etienne.

De son mariage avec Aliénor, il a eu Guillaume (mort en bas-âge), Henri le Jeune, Mathilde, Richard Coeur de Lion, Geoffroy, Aliénor, Jeanne, Jean sans Terre.

Henri II est mort à Chinon le jeudi 06 juillet 1189. Il est inhumé à Fontevrault.

Hoël : Nom porté par plusieurs princes de Petite Bretagne :

- Hoël, Fils bâtard d'Alain Barbe-Torte et d'une concubine nommée Judith (?); comte de Nantes, en 952 Il est assassiné à Nantes par un chevalier nommé Galuron, sur ordre de Conan Ier le Tort, comte de Rennes.

- Hoël, Fils d'Alain Caignard et de Judith, petite fille d'Alain Barbe-Torte; comte de Cornouaille et de Nantes; duc de Bretagne de 1066 à 1084 par son mariage avec Havoise, soeur du duc Conan II et qui lui donne Alain Fergent.

Jean sans Terre ( Rex Angliae, Dominus Hiberniae, Dux Normanniae et Dux Aquitaniae).

Fils de Henri II d'Angleterre et Aliénor d'Aquitaine. Né à Beaumont Palace, Oxford, le dimanche 24 décembre 1167, jour de Noël ! Épouse sa cousine Hadwita, fille de Guillaume, comte de Gloucester le mardi 29 août 1189 (mariage annulé en 1200 pour cause de consanguinité). Couronné roi d'Angleterre à Westminster le jeudi 27 mai 1199. Il enlève et épouse en secondes noces, à Bordeaux, le jeudi 24 août 1200, Isabelle, fille unique d'Aymar Taillefer, comte d'Angoulême, âgée de douze ans. Allié tactique de Philippe Auguste, roi de France, contre son propre frère Richard Coeur de Lion, roi légitime. Puis il lutte contre son neveu Arthur Ier de Bretagne, successeur désigné au trône d'Angleterre, dont il se débarrasse en le faisant assassiner près de Rouen le jeudi 03 avril 1203, pour s'emparer définitivement du pouvoir. Jean sans terre est décédé au château de Newark le mercredi 19 octobre 1216. Il a été inhumé à la cathédrale de Worcester.

Leoninus :

a) selon Encyclopédie des dates et des évènements : c. 1175, Léonin compose le Magnus Liber organi de Graduali.

b) selon DUHG : poète latin du XIIè siècle, était, à ce qu'on en croit, chanoine de Saint-Benoît à Paris. Il a mis en vers rimés l'Histoire de l'ancien et du nouveau Testament. On le regarde à tort comme l'inventeur des vers rimés connus sous le nom de léonins; ces vers étaient en vogue dès le VIIIè siècle.

JCE : il s'agit d'une période très troublée pour la papauté, car nous trouvons d'un côté les partisans de l'empereur Frédéric Barberousse et de l'autre les rois d'Angleterre et de France.

Pape élu à la majorité Antipapes, protégés de l'empereur

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Alexandre III Victor IV (Orlando Bandinelli) (Ottaviano de Montecello) 07 septembre 1159 07 septembre 1159

Pascal III 22 avril 1164 (canonise Charlemagne en 1165)

Calixte III 20 novembre 1168 se soumet et reconnaît Alexandre en 1176

décès d'Alexandre le 30 août 1181

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Louis VII le Jeune : 2ème fils de Louis VI le Gros. Né en 1120.

Roi de France à partir de 1137.

Il épouse successivement :

- Aliénor d'Aquitaine, qui lui donne Marie (de Champagne) et Alix; mariage dissout le mardi 11 mars 1152, pour cause d'adultère incestueux;

- Constance de Castille, qui lui donne Alix et Marguerite;

- Adèle de Champagne, qui lui donne Philippe II Auguste.

Louis VII le Jeune est mort en 1180.

Lucius III (Ubaldo Allucingoli) : Né à Lucques. Moine cistercien, cardinal-évêque d'Ostie, succède à Alexandre III sur le trône pontifical. Élu pape, à Velletri, le mardi Ier septembre 1181; consacré le dimanche suivant. Il réside à Vérone. Il y a décidé, avec l'empereur Barberousse, le principe d'une troisième croisade. Il est décédé à Vérone le lundi 25 novembre 1185.

Marie de Champagne : Fille aînée du roi de France Louis VII et d'Aliénor d'Aquitaine. Elle est ainsi demi-soeur de Philippe II Auguste. Née (à Troyes ?) en 1145.

Elle a épousé en 1164 Henri Ier le Libéral, comte de Champagne, à qui elle a donné successivement, en 1166: Henri II (qui sera fait roi de Jérusalem en 1191), en 1168: Scholastique, en 1173: Marie, en 1179: Thibault.

Marie de Champagne est décédée (à Troyes ?) le mercredi 11 mars 1198 et inhumée en la cathédrale de Meaux. Elle a été la protectrice de Chrestien de Troyes. Son influence a été particulièrement importante dans l'élaboration du mythe du Saint-Graal.

Marie de France : Fille de Philippe Auguste et d'Agnès de Méranie. Épouse d'Arthur Ier de Bretagne.

Marie de France : Poétesse, de la seconde moitié du XIIè siècle; auteur de Fables et de Lais.

Philippe II Auguste : Fils de Louis VII et d'Adèle de Champagne. Né à Gonesse près de Paris en (?) août 1165. Succède à son père, à l'âge de 15 ans, en (?) 1180.

Il épouse en premières noces Isabelle de Hainaut, qui lui donne le futur roi Louis VIII. Celle-ci décède en 1190.

Il s'allie à Richard coeur de lion contre le père de celui-ci, Henri II, roi d'Angleterre et époux d'Aliénor d'Aquitaine (Ière épouse de son propre père). .

Philippe Auguste participe à la troisième croisade, en compagnie de Richard coeur de lion, de 1190 à 1191.

De retour en France, il soutient d'abord Jean sans terre, puis Arthur Ier de Bretagne contre Richard coeur de lion.

Il épouse en secondes noces Ingeburge de Danemark, le dimanche 15 août 1193, mais la répudie le vendredi 05 novembre suivant, ce qui lui vaut d'être aussitôt excommunié.

Il épouse en troisièmes noces Agnès de Méranie, en juin 1196, qui lui donne Philippe Hurepel, futur comte de Clermont et une fille prénommée Marie de France (épouse d'Arthur Ier de Bretagne).

Il répudie Agnès de Méranie et revient à Ingeburge en 1201 afin de faire lever l'excommunication.

Philippe-auguste est mort à Mantes la Jolie en (?) 1223.

Philippe (de Dreux) : Fils de Robert Ier de Dreux dit Le Grand, lui-même frère de Louis VII le Gros, roi de France et d'Agnès de Braine, veuve de Milon, comte de Bar-sur-Seine. Demi-frère de Robert II et frère de Henri, évêque d'Orléans. Évêque de Beauvais en 1175. Pair de France en 1176. Il participe à la troisième croisade et aborde en Palestine à la mi-septembre 1189, en compagnie d'Erard II de Brienne, comte de Bar et son propre frère Robert II de Dreux (R.Grousset, Croisades, p 211). Il se trouve à Tyr, le mardi 28 juillet 1192, lorsque le chef de l'armée chrétienne, Conrad de Montferrat, est assassiné par deux sicaires de Sinân, extrémiste musulman (R.Grousset, Croisades, p 230). Philippe de Dreux est décédé à Beauvais le dimanche 12 novembre 1217 et inhumé en sa cathédrale.

On peut trouver des éléments de sa biographie dans :

- Histoire de la ville et du château de Dreux, par Mme Philippe Lemaître, 1850; p 226 à 228;

- Dictionnaire de biographie française, par R. d'Amat et R. Limouzin-Lamothe, 1967; p 750;

(Envois de la B.M de Dreux)

La mention de ce personnage est intéressante à plusieurs points de vue.

- c'est à Beauvais que Chrestien de Troyes et Guillaume le Breton se sont rencontrés;

- les seigneuries de Bar (Barrois) et de Brienne (le Château) sont voisines, étant toutes deux sur l'Aube et dépendant du comté de Champagne, fief d'Henri de Champagne et de Marie, protectrice de Chrestien de Troyes.

La famille de Brienne est liée à la celle de Montfaucon-Montbéliard par mariage. Or, il se trouve que le village de Boron, d'où est originaire Robert de Boron, le créateur du Saint-Graal, fait partie de la seigneurie de Montbéliard.

Raoul Ier de Gaël : Fils de Ralph de Wader le Staller, comte de Norfolk et de N...(?) de Gaël, descendante des rois de Petite Bretagne; sire de Gaël, de Montfort et de Montauban. Guillaume le Conquérant le fait roi d'East Anglia, contenant les comtés de Norfolk et Suffolk, dont il était déjà en partie héritier du chef de son père.

En 1075 (?) il épouse Emma, fille du comte de Hereford, William Fitz Osbern et se brouille avec le roi Guillaume. De retour en Petite Bretagne après avoir été expulsé manu-militari d'Angleterre, Raoul de Gaël fait construire le château de Montfort, de 1086 à 1091 et participe à la guerre qui oppose le duc Hoël de Cornouaille à Geoffroy le Moustachu, comte de Rennes, du côté de celui-ci. Raoul de Gaël prend part à la première croisade, en 1095 et trouve la mort au siège de Nicée en 1099. Il laisse trois fils : Guillaume (mort en Angleterre en 1102), Raoul II (héritier du titre) et Alain (mort en Palestine).

Du point de vue héraldique, Mark Gaultier pense, sans pouvoir toutefois l'affirmer, que c'est Raoul Ier de Gaël qui a introduit le dragon dans les armes de la famille. Quelle que soit la personne qui a opéré cette introduction, celle-ci démontre bien la revendication familiale du thème arthurien, à travers le symbole d'Uther ou de Merlin.

Raoul II de Montfort : 2ème fils de Raoul Ier de Gaël et d'Emma; sire de Gaël, de Montfort, de Hédé et de Montauban. Conseiller d'Henry Ier, roi usurpateur du trône d'Angleterre, qu'il assiste à la bataille de Tinchebray, en Normandie, en 1106. Il est décédé en 1143.

Richard Coeur de Lion (Rex Angliae, Dux Normanniae et Aquitaniae et Comes Andegaviae) :

3ème fils (et 4ème enfant) d'Henri II d'Angleterre et d'Aliénor d'Aquitaine. Né à Beaumont Palace, Oxford, le dimanche 08 septembre 1157. Couronné à Westminster le 03 septembre 1189. Participe à la 3ème croisade, en même temps que Philippe Auguste, à partir de 1190. Il épouse Bérengère, fille de Sanche VI de Navarre, à Chypre, le dimanche 12 mai 1191. Il s'empare de Saint-Jean d'Acre le vendredi 12 juillet 1191, ou il fait massacrer 3000 prisonniers musulmans. Le mercredi 02 septembre 1192, il conclut une trêve avec Saladin et s'embarque pour l'Europe. Victime d'un complot hourdé par Philippe Auguste et Jean sans Terre, il est arrêté par le duc Léopold d'Autriche en 1192 qui le livre à l'empereur Henri VI le Cruel. Il est libéré en 1194 contre une très forte rançon (250000 marcs d'argent). Rentré en Angleterre, il s'applique à récupérer ses domaines et ses droits, dont il avait été dépossédé en son absence par son frère Jean sans Terre. Voulant soumettre la Petite Bretagne, il est mis en déroute près de Carhaix, en 1197. Richard Coeur de Lion est blessé d'un coup de flèche à Châlus en Limousin le lundi 22 mars 1199 et décède le mardi 06 avril suivant. Il est inhumé à Fontevrault.

Saladin (Yûsuf Salâh Al-Dîn Al-Ayoubi) : d'origine kurde, né à Takrit, dans le district d'Ayoubi, en 1138. Son père était gouverneur militaire de cette ville pour le compte du calife de Bagdad. Il succède en 1177 à Nûr al-Dîn dans la poursuite de la guerre contre le Croisés. Il remporte de nombreuses victoires et récupère des places importantes, dont Tibériade, Nazareth, Sidon, Beyrouth, Ramla, Gaza, Hébron, Acre (siège du patriarcat de Jérusalem, siège du Grand Maître du Temple et où paraît-il se trouve la Vraie Croix !) et enfin Jérusalem, le vendredi 02 octobre 1187. Le mercredi 02 septembre 1192, il négocie un traité avantageux avec Richard coeur de lion. Il meurt à Damas le mercredi 03 mars 1193.

Signification du nom : Yûsuf = Joseph; Salâh = (Le) Parfait; Al-Dîn = Religion

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Je mets en exergue le personnage :

Guillaume le Breton : Historien et poète, né en Léon de Bretagne armoricaine (Abbé Poisson, Histoire de Bretagne, p 93), vers 1165, alors que Conan le Petit est duc de Bretagne. Surnommé Armoricus ou Brito-armoricus. Remplit les fonctions de chapelain, de conseiller intime, puis d'historien de Philippe-auguste. Il est mort vers 1227, en qualité de chanoine de Senlis. Il a été le témoin oculaire de la plupart des faits qu'il a racontés (NLI.DUE). Il a laissé Histoire des Gestes de Philippe-auguste et la Philippique, poème en 12 livres.

J'ai aussi souligné l'insertion du rite de l'élévation à la messe, de façon à ce que chacun puisse comprendre que ce rite n'existait pas auparavant.

JCE :)

MessagePosté: Mar 04 Jan, 2005 13:32
de Gwalchafed
Petite réflexion sur la partie pédagogie de l'article : quand on voit à quel point les courants littéraires s'interpénètrent, quel dommage une fois encore de n'avoir qu'un cours de français et non point un cours de littérature...