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MessagePosté: Lun 18 Aoû, 2003 18:31
de mikhail
Malgré le changement de langue(s), de religion, de culture (?) il est étonnant comme des contes ont maintenu leur prototype par-delà plus de 15 siècles, au minimum !
J'avais vu la même persistance très indo-européenne ou celtique dans un conte vosgien, en français, mais je ne me rappelle plus le conte lui-même.

En fait, le changement de culture semble bien plus difficile et bien plus lent que les apparences le laissent penser. Mais il aura fallu Dumézil et le travail autour de lui pour s'en rendre compte, venant couronner le travail des 'folkloristes' allemands (Grimm) ou français sur près de deux siècles...

Inversement, on voit comment un conte narte est totalement modifié par le passage chez les Ingouches, Tcherkesses, Tchétchènes, Géorgiens... qui ne sont pas des Indo-européens. A l'exception des Svanes, qui ont adopté la tripartition presque mieux que les Ossètes.
In : Georges Charachidzé, La mémoire indo-européenne du Caucase, Hachette 1987, 154 pages.

mikhail

MessagePosté: Lun 18 Aoû, 2003 18:54
de Muskull
Bonsoir :)

Effectivement Patrice les analogies sont troublantes entre le combat de Lug et Balor, David et Goliath (la fronde), mais aussi Ulysse et polyphème le cyclope. A ce propos Homère dit des choses intéressantes. J'y reviendrai dans un prochain post :wink:

Un personnage historique, de plus un héros ! :D

L'un des épisodes les plus glorieux de l'histoire tourmentée de "la Perle des Caraibes", est la résistance victorieuse qu'elle oppose à l'Amiral Vernon. Celui-ci, en 1741, à la tête de 27 000 hommes appuyés par 3 000 pièces d'artillerie, l'assiège en vain pendant cinquante-six jours. Le héros de la défense, dont la statue orne l'entrée de la forteresse, se nomme Don Blas de Lezo, personnage de légende s'il en est. En effet, il perd la jambe gauche à la bataille de Gibraltar, l'oeil droit à celle de Toulon et pour faire bonne mesure, le bras droit à celle de Barcelone. C'est donc un borgne, unijambiste et manchot qui, face aux troupes anglaises et à la tête de seulement 2 500 hommes y compris des esclaves noirs et des indiens, assure avec succès la défense de la cité. Mais, comble de malchance, Don Blas est alors blessé à l'unique jambe qui lui reste et, cruauté du sort, décède peu après la levée du siège.
http://site.voila.fr/voyagesvoeuxjaffry/aaabcol6.htm

Et un mythe africain dont le thème rejoint à mon avis celui du tout premier conte de Patrice : permettre à l'homme de faire son travail.

"Le dernier exemple que je vous propose est un extrait de la légende fondatrice du dieu des guérisons. Ce dieu est infirme ( comme vous le savez, peut - être déjà ) ; il est manchot, borgne, unijambiste et aphone, parce que pendant qu'il dormait, Lêgba fit écrouler sa demeure sur lui pour venir en aide au sorcier guérisseur. L'homme s'était plaint , en effet, au dieu de la tête - Lêgba - de ne plus pouvoir subvenir à ses besoins, faute de malades à soigner ; le dieu des médecines , très efficace, ne lui laissait plus rien à faire. Le dieu atrophié eut besoin de l'homme, depuis l'accident, pour accomplir sa mission ; l'homme pouvait ainsi continuer à vivre de son ouvrage. "
http://www.ecritdire.com/ecdnouvers/falegba.htm

MessagePosté: Mar 12 Juin, 2012 17:15
de ejds
Dans le cours des astres, il en est longuement question ici :

Les boiteries rituelles de printemps

Chronos secoué de sa torpeur, n’aurait pas chipoté de son temps sur ce sujet d’étude particulièrement étiré et parfois éthylique car plus l’on boit et plus l’on boîte. Clopin-clopant, un p’tit résumé de ce pas par là :

Antonia Gasquez, Édith Heintzmann, dans " Les mythes", Éditions Nathan, 1993, 129 pages, p. 116, a écrit:
Boiterie et monosandalisme

De nombreux héros sont boiteux : Ulysse, Œdipe, Achille, Tristan… Dans la Bible, Jacob devient boiteux après son combat avec l’ange.

D’autres héros se caractérisent par le fait qu’ils se présentent chaussés d’une seule sandale : Jason, Persée.

Tous ces personnages ont en commun une démarche asymétrique, qui met en valeur leur déséquilibre : une partie de leur nature est divine et l’autre est humaine ; ils ont un pied dans chacun des deux mondes.

Lorsque les enfants jouent à la marelle, ils parcourent sur un pied un itinéraire qui les conduit de la Terre au Ciel ; puis ils se retournent et font le chemin dans l’autre sens. Ce jeu, qui à l’origine correspondait à un rite religieux, figure le trajet du héros mythique et mime sa démarche.

Un roman français du XIVe siècle, Mélusine, raconte l’histoire d’une fée mariée à un humain. A l’origine déesse gauloises des eaux et de la mort, Mélusine se transforme tous les samedi : le bas de son corps devient celui d’un serpent.
Les enfants nés de son union avec son mari Raymondi ont tous une particularité physique qui les rend dissymétriques : les yeux de l’aîné sont de couleurs différentes, le second a une oreille plus grande que l’autre, le troisième un œil plus grand que l’autre, le quatrième porte sur la joue gauche l’empreinte d’une patte de lion velue, le cinquième n’a qu’un œil, le sixième a une dent plus grande que les autres, le septième une tâche velue sur le nez, le huitième a trois yeux.

Tous ces signes indiquent l’origine double des enfants, leur dissymétrie les rapproche des boiteux et des « monosandalismes » à la démarche inégale, clochant entre deux mondes.