Rutènes provinciaux [Albienses] - Cité de la province romaine de Gaule ultérieure (la future province de Narbonnaise), mentionnée par César par l'expression Rutenis prouincialibus, les "Rutènes provinciaux" (Guerre des Gaules, I, 45 ; VII, 7). Au Ier s. ap. J.-C., Pline les a mentionné sous le nom de Ruteni (Histoire naturelle, III, 37) Cette cité fut mentionnée par la suite beaucoup plus tardivement dans la Notice des Gaules, au IVe s. ap. J.-C., par le nom ciuitas Albiensium, la "cité des Albienses (habitants d'Albi)". Leur territoire correspondait à ceux des anciens diocèses d'Albi et de Castres, soit toute la partie de l'actuel département du Tarn située au nord du Thoré et de l'Agout. Comme l'indique l'attestation fournie par la Notice des Gaules, leur métropole était Albiga (Albi).
Après la conquête romaine, les deux fractions du peuple rutène ne furent pas réunifiées. Ils constituèrent donc deux cités indépendantes. Ainsi, l'Histoire naturelle de Pline mentionne les Rutènes de l'ancienne Gallia celtica au sein de la province de Gaule aquitaine (IV, 109), tandis que les Rutènes provinciaux furent rattachés à la province de Gaule narbonnaise (III, 37).
Au IIIe s. ap. J.-C., alors que la plupart des métropoles prirent le nom de leur cité, un phénomène inverse se déroula chez cette fraction du peuple rutène. En effet c'est la métropole, Albiga (Albi), qui donna son nom à la cité, laquelle devint donc la ciuitas Albiensium, la "cité des Albienses (habitants d'Albi)" (Notice des Gaules). Dans ce cas précis, il semble que cela s'explique par la nécessité de les distinguer de leurs voisins de la ciuitas Rutenorum, la "cité des Rutènes" dont la métropole était l'actuelle Rodez. C'est également à cette même époque, et plus précisément dans le cadre de la réforme provinciale de Dioclétien (fin du IIIe s. ap. J.-C.) que cette cité fut rattachée administrativement à la province d'Aquitaine première (Notice des Gaules).
César, Guerre des Gaules, I, 45 :"Q. Fabius Maximus avait vaincu les Arvernes et les Rutènes, et Rome, leur pardonnant, ne les avait pas réduits en province, et ne leur avait pas imposé de tribut. S'il fallait s'en rapporter à la priorité de temps, elle serait pour le peuple romain un juste titre à l'empire de la Gaule ; s'il fallait s'en tenir au décret du sénat, elle devait être libre, puisqu'il avait voulu que, vaincue, elle conservât ses lois."
César, Guerre des Gaules, VII, 7 :"Cependant le Cadurque Luctérios, envoyé chez les Rutènes, les attire au parti des Arvernes, va de là chez les Nitiobroges et les Gabales, qui lui donnent les uns et les autres des otages ; puis, à la tête d'une nombreuse armée, il marche pour envahir la Province du côté de Narbonne. À cette nouvelle, César crut devoir préférablement à tout partir pour cette Province. Il y arrive, rassure les peuples effrayés, établit des postes chez ceux des Rutènes, qui dépendent de la province, chez les Volques Arécomiques, chez les Tolosates et autour de Narbonne, lieux qui tous étaient voisins de l'ennemi. En même temps, il donne ordre à une partie des troupes de la province, et au renfort qu'il avait amené de l'Italie, de se réunir chez les Helviens, qui sont limitrophes des Arvernes."
Pline, Histoire naturelle, III, 36-37 :"Dans l'intérieur des terres, colonies : Arles de la sixième légion, Béziers de la septième, Orange de la seconde ; dans le territoire des Cavares, Valence, des Allobroges Vienne ; villes latines : Aix des Salluviens, Avignon des Cavares, Apta Julia des Vulgientes, Alébécé des Reies Apollinaires, Alba des Helves, Augusta des Tricastins, Anatilia, Aeria, Bormanni, Comacina, Cabellio, Carcasum des Volces Tectosages, Cessero, Carpentoracte des Mémines, Ies Caenicenses, les Cambolectres, surnommés Atlantiques, Forum Voconii, Glanum Livii ; les Lutevans, appelés aussi Foroneronienses ; Nîmes des Arécomiques, Piscènes, les Rutènes, les Samnagenses ; Toulouse des Tectosages, sur la frontière de l'Aquitaine ; les Tascons, les Tarusconienses, les Umbraniques ; les deux capitales de la cité des Vocontiens alliés, Vasio et Lucus Augusti ; dix-neuf villes sans renom, de même que vingt-quatre attribuées à Nîmes."