Peuple de la Gaule celtique, puis de la province de Gaule aquitaine, dont le territoire correspondait à celui de l’ancienne province du Périgord, dont les limites coïncidaient assez largement avec celle du diocèse de Périgueux, avant 1790. Leur principal oppidum pourrait avoir été celui de La Curade (Coulounieix-Chamiers, Dordogne), auquel a succédé, à l’époque romaine, le site voisin de Vesunna (Périgueux, Dordogne).
Attestations et étymologie
La plus ancienne mention des Pétrocores se trouve dans la Guerre des Gaules de César où ils apparaissent sous la forme Petrocori (VII, 75). Ils furent par la suite mentionnés sous les formes Πετροκόριοι par Strabon (Géographie, IV, 2) et Ptolémée (Géographie, II, 7, 12), et Petrocori par Pline, Histoire naturelle, IV, 109). Les quelques sources épigraphiques mentionnant cet ethnonyme privilégient la forme Petrucori ; on relève ainsi PETRVCORIO (CIL 12, 275), PETRVCOR() (CIL 13, 972) et NA(TIONE) PETRVCORIVS (CIL 13, 7031). En raison de ces variantes orthographiques, les historiens contemporains francisent cet ethnonyme de trois manières différentes : Pétrocores, Pétrocoriens et Pétrucores. L’étymologie de ce nom n’est guère difficile, puisqu’on y reconnaît un composé gaulois en *petru-corii, avec *petru-, qui signifie "quatre", associé à *-corio-, "troupe / armée". L’ensemble peut donc se traduire par "(ceux aux) quatre armées / troupes" (Delamarre, 2003 ; 2019 ; 2023 ; Lacroix, 2003). Les noms de Périgueux et du Périgord sont issus de cet ethnonyme.
Histoire
● Protohistoire
Depuis près de deux siècles, de nombreuses découvertes archéologiques furent réalisées sur la rive gauche de l’Isle, face à Périgueux. Deux sites se distinguent, le premier, fort étroit, se situe au niveau du lieu-dit Écorneboeuf, tandis que le second est un éperon barré dénommé localement Camp de César ou Camp de La Curade. Tous deux sont voisins et situés sur le territoire de la commune de Coulounieix-Chamiers (Dordogne). Depuis longtemps déjà, on considère qu’il s’agissait là de la capitale pré-romaine des Pétrocores (Colin, 2007 ; Chevillot, 2012).
● Guerre des Gaules
Tout au long de la Guerre des Gaules (58-51 av. J.-C.), les Pétrocores se montrèrent bien discrets. L’unique mention faite de ce peuple apparaît lors de l’énumération des peuples qui prirent part à la levée de l'armée de secours chargée de contraindre les Romains à lever le siège d'Alesia (52 av. J.-C.), dans le cadre de laquelle ils fournirent un contingent de 5000 hommes (César, Guerre des Gaules, VII, 75).
● Intégration de la cité des Pétrocores à l'Empire romain
En 27 av. J.-C., dans le cadre de la réorganisation administrative de la Gaule opérée par Auguste, le territoire des Pétrocores fut intégré à la province de Gaule aquitaine (Pline, Histoire naturelle, IV, 109). Quelques années plus tard, lorsque Auguste définit le statut des cités de la province (16-13 av. J.-C.), les Pétrocores furent considérés comme une cité stipendiaire (Histoire naturelle, IV, 109), donc soumis au paiement du tribut.
Ce fut au cours de cette même époque que les établissements indigènes de la rive gauche de l’Isle périclitèrent, tandis que Vesunna prenait naissance ex nihilo sur l’autre rive (Colin, 2007 ; Chevillot, 2012). Cette nouvelle métropole fut édifiée suivant le modèle romain et rapidement dotée d’une parure monumentale.
● La cité des Pétrocores au Bas-Empire
Au cours de la seconde moitié du IIIᵉ s. ap. J.-C., une grande partie de la Gaule fut exposée à la menace des Alamans. Les Pétrocores n’y firent pas exception, si bien qu’entre 276 et 290 ap. J.-C., ils dotèrent Vesunna d’une enceinte fortifiée (Penaud, 2003).
Dans le cadre de la réforme provinciale de Dioclétien (dernière décennie du IIIᵉ s. ap. J.-C.), la province de Gaule aquitaine fut divisée en deux nouvelles provinces. À cette occasion, la cité des Pétrocores intégra la province d’ Aquitaine seconde (Notice des Gaules).
Sources littéraires anciennes
César, Guerre des Gaules, VII, 75 :"Pendant que ces choses se passaient devant Alésia, les principaux de la Gaule, réunis en assemblée, avaient résolu, non d'appeler aux armes tous ceux qui étaient en état de les porter, comme le voulait Vercingétorix, mais d'exiger de chaque peuple un certain nombre d'hommes ; ils craignaient, dans la confusion d'une si grande multitude, de ne pouvoir ni la discipliner, ni se reconnaître, ni se nourrir. Il fut réglé que les divers états fourniraient, […] ; les Pictons, les Turons, les Parisii, les Helvètes, huit mille chacun ; les Ambiens, les Médiomatrices, les Petrocores, les Nerviens, les Morins, les Nitiobroges, chacun cinq mille ; les Aulerques Cénomans, autant ; […]."
Pline, Histoire naturelle, IV, 109 :"[A l'Aquitaine appartiennent …] les Bituriges libres, appelés Cubes ; les Lemovices, les Arvernes, libres ; les Vellaves, libres ; les Gabales ; d'un autre côté, les Rutènes, qui sont limitrophes de la Gaule Narbonnaise ; les Cadurques, les Antobroges et les Pétrocores, séparés des Toulousains par le Tarn."
Strabon, Géographie, IV, 2 :"Voici, maintenant, quels sont les peuples compris entre le Garounas et le Liger qui ont été, avons-nous dit, annexés à l'Aquitaine : les Éluens, d'abord, dont le territoire commence à partir du Rhône ; immédiatement après les Éluens, les Vellaves, qui faisaient partie naguère de la nation des Arvernes, mais qui, aujourd'hui, sont indépendants ; puis les Arvernes eux-mêmes, les Lémovices et les Pétrocoriens, auxquels il faut ajouter les Nitiobriges, les Cadurques et les Bituriges-Cubes ; sur le littoral, les Santons et les Pictons, les premiers, riverains du Garounas, les autres, riverains du Liger ; enfin, les Rutènes et les Gabales, sur les confins de la Narbonnaise. Il y a de belles forges chez les Pétrocoriens, ainsi que chez les Bituriges-Cubes ; des fabriques de toiles de lin chez les Cadurques, et des mines d'argent chez les Rutènes et chez les Gabales."
Lyon (CIL 13, 1704) [P]OMPEIAE SABINAE FILIAE C(AI) POMPEII SANCTI NEPTI [M(ARCI)] POMPEII [L]IBONIS // C(AIO) POMPEIO M(ARCI) POMPEII LIBONIS SACER[D]OTIS FILIO C(AI) POMPEI SANCTI SACERDOTIS NEPOTI QVIRINA SANCTO // [PETRVCORII] PVBLICE
"A Pompeia Sabina, fille de Marcus Pompeius Libo, petite-fille de Caius Pompeius Sanctus." "A Caius Pompeius Sanctus, fils du prêtre Marcus Pompeius Libo, petit-fils du prêtre Caius Pompeius Sanctus, (de la tribu) Quirina." "Les Pétrucores, (sur les fonds) publics."
Mayence (CIL 13, 7031) ADBOGIVS COINAGI F(ILIVS) NA(TIONE) PETRVCORIVS EQ(VES) ALA(E) RVSONIS AN(NORVM) XXIIX STI(PENDIORVM) X HIC SITVS EST EX TESTAMENTO LIBERTVS FECIT
"Adbogius, fils de Coinagus, de la nation des Pétrucores, cavalier dans l'aile de Ruso, âgé de 28 ans, 10 ans de service, repose ici. Conformément à son testament, son affranchi a fait (ce monument)."
"[…] des Pétrucores. Aulus Pompeius […], fils de Dumnom[…], tribun militaire de la légion […], préfet des ouvriers, a dédié, à ses frais, cet amphithéâtre avec tous ses ornements. Aulus Pompeius, fils d’Aulus Pompeius Tertullus […] s’est chargé de l’achèvement, ainsi que de la dédicace."
"Au seigneur du monde et de la paix, l’empereur César Marcus Annius Florianus, le pieux, favorisé des dieux, invincible Auguste (1), grand pontife, revêtu de la puissance tribunicienne, père de la patrie, proconsul. La cité libre des Pétrucores."
(1) Le règne de Florien fut très éphémère, puisqu’il ne dura que de juillet à septembre 276 ap. J.-C.