Connu dans l'antiquité sous les noms de Tropae Augusti ("trophée d'Auguste") et Tropaeum Alpium ("trophée des Alpes"), il s'agît d'un imposant monument célébrant les nombreuses victoires remportées sur quarante-quatre peuples, au cours des campagnes augustéennes menées dans les Alpes. On y trouve les références à :
D'après l'inscription portée sur le monument, le trophée fut édifié alors qu'Auguste avait été acclamé impérator pour la 14e fois (entre 7 et 3 av. J.-C.), lors du 16e renouvellement annuel de sa puissance tribunitienne (7-6 av. J.-C.), soit en 7-6 av. J.-C. Il fut élevé le long de la voie Iulia Augusta, route terminée en 13-12 av. J.-C. immédiatement après la pacification des Alpes maritimes (14 av. J.-C.). Ce trophée a été édifié sur une éminence bien visible de la mer, située au niveau de l'actuelle commune de La Turbie (Alpes-Maritimes).
Le monument est entièrement construit dans un calcaire blanc-ocre de provenance locale, extrait de la carrière du Mont Justicier à La Turbie. La partie basale du monument est un vaste parallélépipède rectangle à base carrée, de 35 mètres de côté, dont la plate-forme s'élève à 12 mètres de haut. Un vaste péristyle repose sur cette première plate-forme, surmonté par une rotonde comptant originellement 24 colonnes. Le toit conique de cette rotonde était lui-même surmonté par une statue d'Auguste, portant l'ensemble à une cinquantaine de mètres de haut. Malmené par le temps et l'histoire, le trophée n'est que partiellement conservé. Par chance, dans son Histoire naturelle (III, 136-137), Pline a retranscrit l'inscription qui ornait la façade ouest du monument, offrant un éclairage précieux pour la compréhension de l'histoire des peuples de l'arc alpin.
L'inscription du trophée de La Turbie (selon Pline, Histoire naturelle, III, 136-137) IMP(ERATORI) CAESARI DIVI FILIO AVG(VSTO) PONT(IFICI) MAX(IMO) IMP(ERATORI) XIIII TR(IBVNICIA) POT(ESTATE) XVII S(ENATVS) P(OPVLVS)Q(VE) R(OMANVS) QVOD EIVS DVCTV AVSPICIISQVE GENTES ALPINAE OMNES QVAE A MARI SVPERO AD INFERVM PERTINEBANT SVB IMPERIVM P(OPVLI) R(OMANI) SVNT REDACTAE GENTES ALPINAE DEVICTAE TRVMPILINI CAMVNNI VENOSTES VENNONETES ISARCI BREVNI GENAVNES FOCVNATES VINDELICORVM GENTES QVATTVOR COSVANETES RVCINATES LICATES CATENATES AMBISONTES RVGVSCI SVANETES CALVCONES BRIXENETES LEPONTI VBERI NANTVATES SEDVNI VARAGRI SALASSI ACITAVONES MEDVLLI VCENNI CATVRIGES BRIGIANI SOGIONTI BRODIONTI NEMALONI EDENATES ESVBIANI VEAMINI GALLITAE TRIVLLATI ECTINI VERGVNNI EGVITVRI NEMETVRI ORATELLI NERVSI VELAVNI SVETRI
Photo : Les vestiges du trophée des Alpes à La Turbie (Alpes Maritimes). Transformé en forteresse entre le XIe et le XVe s., le trophée a été très endommagé dans le cadre de la guerre ayant opposé la France et la Savoie au début du XVIIIe s. Il a, par la suite, été utilisé comme carrière de pierre par les habitants du village de La Turbie. Après quelques travaux de consolidation (1857), un classement au titre des monuments historiques (1865), plusieurs campagnes de fouilles ont été menées au niveau de ce monument (de 1905 à 1909, puis de 1920 à 1929), ayant permis de retrouver de nombreux éléments architecturaux. Grâce à ces résultats, l'architecte Jules-Camille Formigé put en proposer une restitution graphique. Le monument fut finalement totalement dégagé de ses gravats et partiellement reconstruit de 1929 à 1933 par Jules Formigé (architecte des Monuments historiques, fils du précédent), financé par l'homme d'affaires américain, Edward Tuck.
Sources
• Julien Quiret pour l'Arbre Celtique
• Photo de Julien Quiret