Célébration du triomphe de Cnaeus Manlius Vulso (5 mars 187 av. J.-C.)
Après avoir remporté la guerre galatienne (été / automne 189 av. J.-C.), Cnaeus Manlius Vulso reçut les honneurs du triomphe malgré l'opposition acharnée de quelques commissaires (fin de l'été 188 av. J.-C.) et après avoir éprouvé la crainte d'être inquiété en vertu de la loi Petilia (187 av. J.-C.) (1) (Tite-Live, Histoire romaine, XXXIX, 6).
Nous savons par Tite-Live que ce défilé triomphal eut lieu le 3e jour avant les nones de Martius de la 566e année de Rome, soit le 5 mars 187 av. J.-C. (2) (Histoire romaine, XXXIX, 6). À cette occasion fut exposé à la foule un très riche butin, fruit du pillage et du rançonnage des populations vaincues, au sein duquel figuraient 200 couronnes d'or de 12 livres chacune, 220000 livres d'argent, 2103 livres d'or (3), 127000 tétradrachmes attiques (4), 250000 cistophores (5), 16320 philippes d'or (6), ainsi qu'une grande quantité d'armes et de dépouilles (trophées) galates. À cet étalage de richesses destinées à être portées au trésor s'ajoutaient 52 chefs (probablement des Galates et ceux d'autres cités), qui défilèrent devant le char du vainqueur. Chaque soldat reçut 42 deniers, les centurions 84 deniers, tandis que la solde fut doublée pour l'infanterie et triplée pour la cavalerie. Enfin, sur cet impressionnant butin, le sénat préleva de quoi rembourser les avances financières faites par les créanciers à l'État (Histoire romaine, XXXIX, 7).
Notes
(1) Suivant Tite-Live, Cnaeus Manlius Vulso aurait redouté d'être cité devant le tribunal de Quintus Terentius Culleo, institué en vertu de la loi Petilia (187 av. J.-C.), contre ceux qui ayant reçu de l'argent d'Antiochos III Mégas. Suivant l'opinion des historiens modernes, l'existence même de cette loi est plus que douteuse (Ferrary, 2007). Cette partie du récit de Tite-Live peut donc être considérée comme suspecte.
(3) Une livre romaine (libra) équivalait à un poids compris entre 327 et 325 grammes, suivant les estimations. Tite-Live évoque donc 12 couronnes d'or de près de 3,9 kilogrammes chacune, 71,5 à 71,94 tonnes d'argent et 683,47 à 687,68 kilogrammes d'or.
(4) Il s'agissait de monnaies d'argent, dont le poids était alors de 16,8 grammes. À cette époque, de nombreux territoires autres que la cité d'Athènes frappaient des monnaies en utilisant l'étalon attique, notamment l'empire séleucide, le royaume du Pont, le royaume de Bithynie, le royaume de Cappadoce, le royaume de Macédoine et quelques autres cités de leurs dépendances (Le Rider, 1998).
(5) Le cistophore était la monnaie d'argent de Pergame, d'un poids de 12,6 grammes, qui fut frappée après la paix d'Apamée, en 188 av. J.-C. (Le Rider, 1990).
(6) Il s'agît de statères d'or d'un poids moyen de 8,6 grammes. Compte-tenu de la date des évènements, il s'agissait probablement de monnaies frappées du temps de Philippe V (221-179 av. J.-C.).
Sources épigraphiques
Fastes triomphaux capitolins - mention n°180 [CN(AEVS) MANLIVS CN(AEI)] F(ILIVS) L(VCI) N(EPOS) VVL[SO PRO AN(NO) DLXVI] [CO(N)S(VLE) EX ASIA DE GALLEISIII NON(AS) MART(IAS)]
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"Cnaeus Manlius Vulso, fils de Cnaeus (Manlius Vulso), petit-fils de Lucius (Manlius Vulso), propréteur, (victorieux) en Asie des Gaulois, (a reçu les honneurs du triomphe), la 566e année (de Rome), le 3e jour avant les nones de Martius."
Sources littéraires anciennes
Tite-Live, Histoire romaine, XXXIX, 6 : "Ce fut à la fin de cette année, après la nomination des magistrats, trois jours avant les nones de mars, que Cn. Manlius Vulso triompha des Gaulois d'Asie. Le motif qui lui avait fait différer son triomphe fut la crainte de se voir cité, en vertu de la loi Pétilia, devant le tribunal du préteur Q. Térentius Culléo, et enveloppé dans l'arrêt de proscription qui avait frappé L. Scipion. Il savait que les juges seraient d'autant plus sévères à son égard qu'il avait relâché par tous les excès de la licence les liens de la discipline militaire si rigoureusement maintenue par son prédécesseur. D'ailleurs les désordres commis, disait-on, par ses soldats dans cette province lointaine, n'étaient pas les seuls griefs qu'on eût à lui reprocher ; on blâmait encore plus ceux auxquels ils se livraient tous les jours sous les yeux de leurs concitoyens. En effet, le luxe des nations étrangères n'entra dans Rome qu'avec l'armée d'Asie; ce fut elle qui introduisit dans la ville les lits ornés de bronze, les tapis précieux, les voiles et tissus déliés, enfin ces guéridons et ces buffets qu'on regardait alors comme une grande élégance dans l'ameublement. Ce fut à cette époque qu'on fit paraître dans les festins des chanteuses, des joueuses de harpe et des baladins pour égayer les convives ; que l'on mit plus de recherche et de magnificence dans les apprêts mêmes des festins, que les cuisiniers, qui n'étaient pour nos aïeux que les derniers et les moins utiles de leurs esclaves, commencèrent à devenir très chers et qu'un vil métier passa pour un art. Et pourtant toutes ces innovations étaient à peine le germe du luxe à venir."
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Tite-Live, Histoire romaine, XXXIX, 7 : "Dans son triomphe, Cn. Manlius étala deux cents couronnes d'or pesant chacune douze livres, deux cent vingt mille livres d'argent, deux mille cent trois d'or, cent vingt-sept mille tétradrachmes attiques, deux cent cinquante mille cistophores, seize mille trois cent vingt philippes d'or, et une grande quantité d'armes et de dépouilles gauloises entassées sur des chariots. Cinquante-deux chefs ennemis marchaient devant le char. Chaque soldat reçut quarante-deux deniers, chaque centurion quatre-vingt quatre; la solde fut doublée pour l'infanterie et triplée pour la cavalerie. Une foule de guerriers de tous grades, ornés de leurs récompenses militaires, venaient à la suite du char et les chants que faisaient entendre les soldats en l'honneur de leur chef attestaient assez la complaisance calculée du général et prouvaient que son triomphe était plus agréable à l'armée qu'au peuple. Mais les amis de Manlius vinrent à bout de lui concilier aussi la faveur populaire ; sur leurs instances, le sénat décréta qu'on prélèverait, sur l'argent porté à ce triomphe, les sommes nécessaires pour acquitter ce qui n'avait pas encore été remboursé des avances faites par le peuple à la république. Les questeurs de la ville payèrent avec une scrupuleuse fidélité les créanciers de l'état, à raison de vingt-cinq as et demi pour mille." |
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