Peuple de la Gaule celtique que Jules César considérait comme une des composantes des Armoricains. Initialement, le territoire de la cité des Unelles couvrait l'ensemble de la péninsule du Cotentin et des îles Anglo-Normandes, il correspondait donc aux anciens diocèses de Coutances et d'Avranches (avant 1790). Selon P. Vipard (1990) et F. Fichet de Clairfontaine (2004a & b), leur métropole a été Crouciatonum (Saint-Côme-du-Mont, Carentan-les-Marais, Manche), avant d'être transférée à Alauna (Alleaume-les-Valognes, Valognes, Manche), puis à Cosedia / Constancia (Coutances, Manche).
Attestations et étymologie
Ce peuple ne fut mentionné par César sous les formes Venellos (Guerre des Gaules, II, 34 ; III, 11 ; VII, 75) et in fines Venellorum (Guerre des Gaules, III, 17), Venelli par Pline (Histoire naturelle, IV, 107), Οὐενέλλους par Dion Cassius (Histoire romaine, XXXIX, 45), Οὐενέλλων (var. Οὐενέλλιν) et Οὐενελλοὶ (var. Οὐενελοὶ) par Ptolémée (Géographie, II, 8, 2, puis II, 8, 5). En dépit de ces attestations concordantes, cet ethnonyme a été francisé en "Unelles", plutôt qu'en "Vénelles".
En 52 av. J.-C., les Unelles participèrent à la levée du contingent de 20000 Armoricains pour l'armée de secours chargée de contraindre les Romains à lever le siège d'Alesia (Guerre des Gaules, VII, 75).
En 51 av. J.-C., les Armoricains furent entraînés par Dumnacos dans une nouvelle révolte, puis rapidement matés par le légat Caius Fabius. Rien ne permet de dire si les Unelles y prirent part.
Lors de la réforme provinciale de Dioclétien (dernière décennie du IIIe s. ap. J.-C.), la cité des Unelles intégra la nouvelle province de Lyonnaise seconde.
Entre la fin du IIIe s. et le début du IVe s. ap. J.-C., le litus saxonicum fut constitué pour lutter contre les incursions effectuées par les Saxons (mais également les Francs). Ce dispositif militaire reposait sur une série de fortifications édifiées sur les côtes de l'île de Bretagne et du nord et du nord-ouest de la Gaule, et dotées de garnisons. D'après le Registre de Dignitaires, une de ces forteresses fut édifiée sur le territoire des Unelles ; Constantia (Coutances). Elle était placée sous le commandement du dux tractus Armoricani et Nervicani (Registre de Dignitaires, XXXVII).
Comme le montre le Registre de Dignitaires (rédigé au IVe-Ve s. ap. J.-C.), le nom de Cosedia s'est progressivement transformé en Constantia (Coutances). Aussi, la cité des Unelles changea progressivement de nom pour prendre celui de sa métropole. Ainsi, au IVe-Ve s. ap. J.-C., elle fut dénommée ciuitas Constantia "la cité de Constantia" (Coutances) dans la Notice des Gaules.
Sources littéraires anciennes
César, Guerre des Gaules, II, 34 :"Dans le même temps, César fut informé par P. Crassus, envoyé par lui, avec une seule légion, contre les Vénètes, les Unelles, les Osismes, les Curiosolites, les Esuvii, les Aulerques, les Redons, peuples maritimes sur les côtes de l'Océan, qu'ils s'étaient tous soumis au pouvoir du peuple romain."
César, Guerre des Gaules, III, 11 :"Il envoie son lieutenant T. Labiénus avec de la cavalerie chez les Trévires, peuple voisin du Rhin. Il le charge de visiter les Rèmes et autres Belges, de les maintenir dans le devoir et de s'opposer aux tentatives que pourraient faire, pour passer le fleuve, les vaisseaux des Germains que l'on disait appelés par les Belges. Il ordonne à P. Crassus de se rendre en Aquitaine, avec douze cohortes légionnaires et un grand nombre de cavaliers, pour empêcher ce pays d'envoyer des secours dans la Gaule, et de si grandes nations de se réunir. Il fait partir son lieutenant Q. Titurius Sabinus, avec trois légions, chez les Unelles, les Coriosolites et les Lexovii, pour tenir ces peuples en respect. II donne au jeune D. Brutus le commandement de la flotte et des vaisseaux gaulois, qu'il avait fait venir de chez les Pictons, les Santons et autres pays pacifiés, et il lui enjoint de se rendre au plus tôt chez les Vénètes, lui-même en prend le chemin avec les troupes de terre."
César, Guerre des Gaules, III, 17 :"Tandis que ces événements se passaient chez les Vénètes, Q. Titurius Sabinus arrivait sur les terres des Unelles avec les troupes qu'il avait reçues de César. Viridovix était à la tête de cette nation et avait le commandement en chef de tous les états révoltés, dont il avait tiré une armée et des forces redoutables. Depuis peu de jours les Aulerques Éburovices et les Lexovii, après avoir égorgé leur sénat qui s'opposait à la guerre, avaient fermé leurs portes et s'étaient joints à Viridovix."
César, Guerre des Gaules, VII, 75 :"Il fut réglé que les divers états fourniraient, savoir les Héduens, avec leurs clients les Ségusiaves, les Ambivarétes, les Aulerques Brannovices, les Blannovii, trente-cinq mille hommes ; les Arvernes avec les peuples de leur ressort, tels que les Eleutètes, les Cadurques, les Gabales, et les Vellavii, un pareil nombre ; les Sénons, les Séquanes, les Bituriges, les Santons, les Rutènes, les Carnutes, chacun douze mille ; les Bellovaques, dix mille ; les Lémoviques, autant ; les Pictons, les Turons, les Parisii, les Helvètes, huit mille chacun ; les Ambiens, les Médiomatrices, les Petrocorii, les Nerviens, les Morins, les Nitiobroges, chacun cinq mille ; les Aulerques Cénomans, autant ; les Atrébates, quatre mille ; les Véliocasses, les Lexovii, les Aulerques Eburovices, chacun trois mille, les Rauraques avec les Boïens, mille ; vingt mille à l'ensemble des peuples situés le long de l'Océan, et que les Gaulois ont l'habitude d'appeler Armoricains, au nombre desquels sont les Curiosolites, les Redons, les Ambibarii, les Calètes, les Osismes, les Lémovices, les Unelles."
Dion Cassius, Histoire romaine, XXXIX, 45 :"Pendant qu'il était encore dans la Vénétie, il envoya son lieutenant Q. Titurius Sabinus dans le pays des Unelles, qui avaient pour chef Viridovix. D'abord Sabinus fut tellement effrayé de leur nombre, qu'il s'estima heureux de sauver son camp ; mais ensuite il reconnut que ses craintes rendaient les Unelles plus audacieux, et qu'en réalité ils n'étaient pas redoutables ; car la plupart des barbares n'ont, pour inspirer de la terreur, que d'arrogantes et vaines menaces. Il reprit courage : cependant il n'osa pas encore en venir ouvertement aux mains avec eux (il était toujours intimidé par leur nombre) ; mais il les amena à attaquer imprudemment son camp, placé sur une hauteur. A cet effet il envoya, vers le soir, aux Unelles comme transfuge un de ses alliés qui parlait leur langue et qui devait leur persuader que César avait été battu. Les Unelles, hors d'état de réfléchir, parce qu'ils avaient bu et mangé avec excès, le crurent sans peine : ils marchèrent en toute hâte contre les Romains, comme s'ils avaient craint d'être prévenus par leur fuite (il ne fallait pas, disaient-ils, laisser échapper même le prêtre qui porte la torche). Emportant ou traînant des sarments et des fagots pour brûler les Romains, ils gagnèrent la hauteur où était le camp de Sabinus et la gravirent rapidement, sans éprouver aucune résistance. Sabinus ne bougea pas, avant que les barbares fussent tous sous sa main ; mais alors il fondit inopinément sur eux de tous les points, frappa d'épouvante les premiers qu'il rencontra et les précipita du haut de la montagne. Dans leur déroute, ils s'embarrassaient les uns les autres et dans les débris d'arbres dont ils étaient chargés. Sabinus les battit si rudement, que ni eux ni d'autres n'osèrent plus se mesurer avec les Romains ; car les Gaulois sont tous également entraînés par une fougue que rien ne règle, et n'ont de mesure ni dans la crainte ni dans l'audace : ils passent subitement de l'excessive confiance à la crainte et de la crainte à une aveugle confiance."
Pline, Histoire naturelle, IV, 107 :"La Gaule Lyonnaise renferme les Lexoviens, les Véliocasses, les Calètes, les Vénètes, les Abrincatuens, les Ossismiens ; la Loire, fleuve célèbre ; une péninsule remarquable qui s'avance dans l'Océan, à partir des Ossismiens, dont le tour est de 625.000 pas, et dont le col a 125.000 pas de large ; au-delà de cette péninsule, les Namnètes ; dans l'intérieur, les Éduens, alliés, les Carnutes, alliés, les Boïens, les Sénons, les Aulerques surnommés Éburoviques, et ceux qui sont surnommés Cénomans ; les Meldes, libres ; les Parisiens, les Tricasses, les Andécaves, les Viducasses, les Bodiocasses, les Venelles, les Coriosuélites, les Diablintes, les Riedons, les Turons, les Atésuens, les Ségusiaves, libres, dans le territoire desquels est Lyon, colonie."
Sources
• F. Fichet de Clairfontaine, (2004a) - "Saint-Côme-du-Mont / Crouciatonnum (Manche)", in : A. Ferdière (dir.), Capitales éphémères. Des Capitales de cités perdent leur statut dans l'Antiquité tardive, Actes du colloque Tours 6-8 mars 2003, Supplément à la Revue archéologique du centre de la France, 25, pp.469-470
• F. Fichet de Clairfontaine, (2004b) - "Valognes / Alauna (Manche)", in : A. Ferdière (dir.), Capitales éphémères. Des Capitales de cités perdent leur statut dans l'Antiquité tardive, Actes du colloque Tours 6-8 mars 2003, Supplément à la Revue archéologique du centre de la France, 25, pp.487-490
• P. Vipard, (1990) - "Le milliaire de Sainte-Mère-Eglise (Manche) et le problème de la localisation de Crovciatonnvm", Annales de Normandie, 10e année, n°3-4, pp.247-262
• Pierre Crombet pour l'Arbre Celtique
• Julien Quiret pour l'Arbre Celtique